Boucher une fuite de pétrole avec du ciment, comme la compagnie BP envisage de le faire cette semaine dans le golfe du Mexique, s'avère une opération délicate, d'autant plus que nombre d'incidents de forage dans le passé semblent avoir été causés par du ciment défectueux.

Alors que des règles strictes s'appliquent au ciment utilisé pour la construction des bâtiments ou des routes, le type de ciment employé pour le cuvelage des puits de pétrole n'est pas réglementé. Les seules normes qui s'appliquent sont celles de l'American Petroleum Institute, c'est à dire le lobby pétrolier.

La mauvaise qualité du ciment est d'ailleurs retenue comme une cause probable de l'explosion de la plate-forme Deepwater Horizon, le 20 avril, à l'origine d'une marée noire dans le golfe du Mexique.

Selon le Service fédéral de gestion des ressources minérales (MMS), 18 des 39 incidents impliquant des puits de pétrole dans le golfe du Mexique ont été causés par des problèmes de ciment entre 1992 et 2006. Le processus de cimentation a été mis en cause à 34 reprises depuis 1978, d'après un décompte de l'Associated Press.

En 2005, par exemple, du ciment défectueux avait provoqué une dislocation du cuvelage du puits de pétrole sur lequel se trouvait alors la plate-forme Deepwater Horizon. Près de 60 000 litres de pétrole s'étaient déversés dans l'eau.

C'est la société américaine Halliburton qui était en charge de la cimentation du puits de pétrole exploité par BP. Elle s'était achevée quelques jours avant l'explosion. Le matériau utilisé consistait en un mélange de ciment et d'azote, qui rend la pâte plus légère, à même de combler les trous du cuvelage pour former avec celui-ci un mur étanche dans le puits foré.

Le ciment doit aussi être résistant à différentes températures et pressions. Le dernier mot sur le mélange final revient toutefois aux compagnies pétrolières et gazières.

«Le ciment est bon marché, il résout de nombreux problèmes, mais ce n'est pas là qu'il faut rogner sur les coûts», comme certaines compagnies pétrolières sont pourtant tentées de le faire, relève Gene Beck, ingénieur pétrolier de l'université Texas A&M.

Bien qu'à l'origine de nombreux accidents, le ciment est également perçu comme une solution pour endiguer la marée noire dans le golfe du Mexique. BP compte ainsi injecter de la boue et du ciment dans le puits, au cours d'une opération délicate qui n'a jamais été essayée à une profondeur de 1.500 mètres, où se situe la fuite.

«Le ciment du puits constitue une barrière indispensable, mais qu'il est difficile de mettre en place et de contrôler», souligne M. Beck.