Au beau milieu du marché du dimanche, dans la rue Franklin, au centre-ville de Tampa, JoAnn Valenti essaie d'attirer l'attention des promeneurs. «C'est difficile», confie-t-elle, un peu découragée, en contemplant sa pétition pour réclamer une meilleure protection des plages par l'État. «Les gens en ont marre de la politique. Dimanche prochain, ça ira mieux.»

La Floride a hâte à mercredi. Harcelés sans relâche par les camps démocrate et républicain qui rêvent de décrocher leur butin de 29 votes au collège électoral, les Floridiens soupirent d'exaspération dès qu'on les interroge sur l'issue du scrutin de demain.

Surtout ici, à Tampa, la ville la plus divisée de l'un des comtés les plus convoités, situé dans l'un des États les plus courtisés. Depuis 1960, tous les présidents qui ont eu l'appui de la Floride ont su rallier le comté de Hillsborough, où se trouve Tampa. Le calcul est simple: gagner à Tampa, c'est mettre la Floride dans sa poche.

En 2008, par exemple, Barack Obama a remporté 53% des voix à Hillsborough, et à peine 51% pour la Floride. Si le sud-est est plutôt démocrate et le nord est surtout républicain, le centre de l'État n'est acquis à aucun des camps. Tout se jouera dans le «corridor de l'autoroute I-4», celle qui va de Tampa à Orlando.

Pas étonnant que les deux camps aient déversé plus de 147 millions de dollars en pub sur la Floride et que les vedettes s'y succèdent pour convaincre leurs partisans d'aller voter demain.

Division

Les 29 votes des grands électeurs de la Floride sont précieux, surtout pour Mitt Romney. Si Obama peut se permettre de perdre la Floride, Mitt Romney n'a pratiquement aucune chance d'accéder à la Maison-Blanche sans elle. Bonne nouvelle pour les républicains: ils détiendraient une légère avance sur leurs adversaires.

Encore que tout dépend de qui pose la question. Les deux derniers grands sondages publiés sont contradictoires. Celui du quotidien Miami Herald affirme que Mitt Romney a six points d'avance sur son rival. Celui du Wall Street Journal et du réseau NBC donne deux points d'avance à Obama - un pourcentage toutefois inférieur à la marge d'erreur du sondage, qui est de 2,5%.

Ce qui n'est pas pour déplaire à Andrew Cob. «Obama a eu sa chance pour redresser l'économie, mais c'est insuffisant», affirme l'homme, qui a voté pour les démocrates en 2008. Evan Johnston, qui interrompt sa lecture de versets bibliques dans un porte-voix le temps de jaser politique, a aussi fait son choix: Mitt Romney. «Il saura faire en sorte que tous les élus travaillent ensemble.» JoAnn Valenti, elle, frissonne. «L'élection de Romney est la pire chose qui puisse nous arriver! Son programme est un tissu de mensonges!»

Stefanie Tilson, 22 ans, est indécise. «Je n'aime pas Romney parce qu'il veut s'attaquer aux droits des femmes. Et je crois que la réforme de l'assurance maladie d'Obama est une bonne chose. Mais je ne sais rien des autres enjeux. Je n'y comprends rien, je n'arrive pas à me faire une idée...»

Le traumatisme

C'est comme si, depuis le recomptage chaotique des votes après l'élection de 2000, la Floride était demeurée traumatisée par les scrutins.

Cette année ne fait pas exception: des files interminables d'électeurs ont engorgé les bureaux de vote par anticipation. Certains ont attendu de trois à six heures en file...

L'élimination du vote par anticipation le dimanche précédant l'élection a aussi indigné le camp démocrate: plusieurs Afro-Américains profitaient en effet de leur sortie à l'église pour aller faire leur devoir de citoyen.

PHOTO SCOTT MCINTYRE, AP/NAPLES DAILY NEWS

Il y avait foule au vote anticipé à Fort Myers, en Floride, le 30 octobre.