Ses partisans passent des milliers de coups de téléphone, plantent des pancartes et veulent croire à la victoire de Newt Gingrich en Floride mardi prochain, mais cette perspective emplit d'effroi les cadres du parti qui ne s'en cachent plus.

Au quartier général de «Newt» à Jacksonville, au rez-de chaussée d'une petite maison de briques rouges, le moral est résolument au beau fixe depuis sa victoire en Caroline du Sud, loin devant son rival Mitt Romney.

«Nous sommes passés de 50 bénévoles à près de 250», explique Bert Ralston, le président du comité de soutien local. «Nous savions que cela allait venir, mais c'est fantastique», ajoute-t-il.

Ces bénévoles viennent chercher des pancartes, des publicités, des autocollants. Vont sur les réunions, et passent des milliers de coups de téléphone par jour pour inciter les gens à voter pour l'ancien président de la Chambre des représentants.

Mardi, un petit garçon de 11 ans a ainsi passé «75 coups de téléphone», raconte John Libby, un bénévole, devant une grande pancarte «l'Amérique a besoin de Newt».

Rien de compliqué. La conversation est courte, en moyenne une minute et demie. Le bénévole lit un texte qui explique que Newt Gingrich est «le seul candidat avec l'expérience et la vision, capable de (...) reconstruire l'Amérique que nous aimons». «Nous espérons votre soutien», ajoute-t-il.

Don Rawlins, professeur d'histoire retraité, encarté du Tea Party ultra-conservateur, soutient résolument Newt Gingrich. Il est venu sur le campus de l'université du Nord de la Floride avec ses pancartes, pour une réunion électorale.

«Le pays est sous l'eau», explique-t-il. «La maison est inondée, et nous voulons le meilleur plombier qui soit, même s'il a des défauts».

M. Gingrich «est direct, il parle de ce qui est important et il a l'expérience dont nous avons besoin», ajoute-t-il.

Leaette Vollmar est carrément venue du Tennessee (sud) avec sa nièce, 900 km en voiture.

«Il est brillant. Il connaît les dossiers. Et il n'est pas une girouette» dit-elle, impitoyable pour Mitt Romney.

En Floride, Newt Gingrich, drapé du manteau de Ronald Reagan, courtise notamment le Tea Party, espérant capitaliser sur la frustration de cet électorat, souvent de la classe moyenne, qui se reconnaît dans son discours contre les élites.

Les derniers sondages montrent cependant un tassement de sa progression enregistrée après la Caroline du Sud. Il est désormais à 31,5% des intentions de vote contre 38,7% pour Mitt Romney, selon une moyenne des sondages faite par le site Realclearpolitics.

Mais certains au sein du Parti républicain ne cachent plus leur malaise face à la renaissance de celui qui avait quitté le Congrès en 1999 sous les critiques, après une enquête de la commission d'éthique soldée par une solide amende.

Jeudi, le parti a laissé le vieux Bob Dole, 89 ans, ex-candidat à la présidence, dire tout haut ce que d'autres murmuraient tout bas, souvent sous couvert d'anonymat, jusque dans les couloirs du Congrès.

«Il est temps de parler avant qu'il ne soit trop tard», a déclaré M. Dole.

Si M. Gingrich, connu pour être imprévisible, «devient le candidat du parti, cela aura un impact négatif sur les candidats républicains, que ce soit pour des postes locaux, dans les États ou au niveau fédéral».

«Quasiment aucun de ceux qui ont connu Newt au Congrès ne l'a soutenu, cela veut tout dire», a ajouté Bob Dole, en rappelant ses années contestées comme président de la Chambre entre 1995 et 1999, où il semblait n'en faire qu'à sa tête et «aimait se battre avec Bill Clinton».

«Cela sera difficile» de garder la majorité à la Chambre, a également souligné le républicain modéré Pete King dans Politico. «Il y a une vraie inquiétude».