L'idée a surgi il y a deux ans, dans un atelier organisé par une petite ONG d'artistes et de communicateurs néerlandais établie dans les territoires palestiniens. Et si on vendait des bouts du mur de Cisjordanie à tous ceux qui souhaitent y inscrire quelques mots?

«Nous cherchions à sensibiliser à la cause palestinienne des gens qui, normalement, ne s'y intéressent pas», explique Faris Arouri, qui participait aux ateliers de Palo Dutch, au printemps 2007, quand l'initiative a été évoquée pour la première fois. Faris Arouri coordonne une autre ONG, palestinienne celle-là: le Forum des jeunes pour la paix et la liberté. Les deux organisations ont passé quelques mois à dessiner le cadre de leur projet. Est-ce qu'on accepte de tout inscrire ou pas? Quelles sont les limites? Sur quel bout de mur? À quel prix?

Finalement, le projet Sendamessage a vu le jour. En gros, ça marche comme suit. Où que vous soyez sur la planète, vous pouvez commander par internet l'inscription que vous souhaitez voir apparaître sur un pan du mur dans un quartier de Jérusalem-Est.

Tout est permis, dans la langue de votre choix, sauf les inscriptions racistes, violentes ou pornographiques. Tout ça pour la somme de 30€ (une cinquantaine de dollars). C'est cher, reconnaît Faris Arouri. «Mais autrement, on aurait été débordés de demandes.»

En 18 mois, plus de 1200 messages ont été inscrits sur le mur. En français, en italien, en allemand, en polonais ou en suédois, des gens utilisent le mur pour y placarder des messages politiques, mais aussi des voeux d'anniversaire, des notices nécrologiques et même des demandes en mariage.

Le mur accueille aussi des citations, des extraits de poèmes et même, sur demande spéciale, des dessins. Ça va du petit coeur au petit lapin, en passant par de véritables murales.

«Nous acceptons même des messages commerciaux, mais nous vérifions s'il s'agit d'une entreprise conforme à nos valeurs», explique Faris Arouri.

Les artistes se déplacent généralement par groupes de deux ou trois. Il faut quelqu'un pour faire l'inscription sur le béton. Et une autre personne pour prendre les trois photos qui seront envoyées au client comme preuve.

Est-ce dangereux? Les tagueurs ne prennent pas de risque: ils inscrivent leurs graffiti du côté palestinien du mur. La barrière n'est pas reconnue par l'Autorité palestinienne. Celle-ci ne peut pas interdire de s'exprimer sur une surface qui n'a aucune existence légale... Faris Arouri appelle ça : profiter d'une faille dans la loi.

Et les profits? Ils sont destinés à de petites ONG palestiniennes. Un petit centre culturel attenant à l'université Birzeit, près de Ramallah, a été le premier à en profiter.

En savoir plus: sendamessage.nl