Le secrétaire américain à la Défense Chuck Hagel a effectué lundi une visite exceptionnelle dans la zone démilitarisée (DMZ) intercoréenne, au premier jour d'une visite en Corée du Sud où il doit discuter du commandement des forces américano-coréennes en cas de guerre avec le Nord.

Quelques mois après sa prise de fonctions en pleine crise déclenchée par le troisième essai nucléaire nord-coréen en février, la visite de M. Hagel revêt une portée symbolique et vise à réaffirmer la solidité de l'alliance entre Washington et Séoul «pour de nombreuses années», a-t-il expliqué.

Dans le village frontière de Panmunjom, où fut signé l'armistice qui mit fin à la guerre de Corée le 27 juillet 1953, le chef du Pentagone a pu avoir un aperçu de «l'un des endroits les plus effrayants au monde», selon l'expression de l'ancien président Bill Clinton: la zone démilitarisée.

Cette bande de terre de 4 km de large et de 248 km de long située à quelques dizaines de kilomètres au nord de Séoul est parsemée de barrières électrifiées, des champs de mines et des murs antichars pour tenter de ralentir une éventuelle attaque venue du Nord.

«Il n'y pas de droit à l'erreur ici», a-t-il dit à des journalistes à une quinzaine de mètres de la ligne de démarcation derrière laquelle des sentinelles nord-coréennes le dévisageaient.

«C'est probablement le seul endroit au monde où il y a toujours un risque de confrontation», a-t-il noté après avoir visité l'un des nombreux postes d'observation érigés le long de la frontière en compagnie de son homologue sud-coréen Kim Kwan-jin.

Il a également dressé un parallèle avec la question des armes chimiques syriennes dont Damas a promis la destruction sous la pression des États-Unis et de la Russie.

Évoquant l'inquiétude de Séoul face aux «stocks très importants d'armes chimiques du Nord», il a jugé que Pyongyang «regardera de très près» la réponse de la communauté internationale sur la question des armes chimiques syriennes.

Le ministre américain avait peu auparavant assisté sur un champ de tir tout proche à un exercice américano-coréen au cours duquel des blindés et des hélicoptères d'attaque Apache simulaient une contre-offensive.

Au cours de son séjour, Hagel doit évoquer avec Kim la question du transfert du «contrôle opérationnel» en cas de guerre, à nouveau posée par Séoul après la dernière crise avec son voisin du Nord.

Le traité de défense mutuel entre Washington, dont le 60e anniversaire sera célébré mardi, et Séoul prévoit que le général américain commandant les quelque 28 500 militaires américains stationnés en Corée du Sud prenne la tête de 640 000 soldats de l'armée du Sud en cas de guerre avec le Nord.

Ce «contrôle opérationnel» doit être remis à l'armée sud-coréenne en décembre 2015 après avoir déjà été repoussé en 2010 après le torpillage de la corvette sud-coréenne Cheonan par un sous-marin nord-coréen.

Mais la récente crise avec le Nord a conduit Séoul à solliciter un nouveau report, allant à l'encontre des déclarations du président Barack Obama appelant à respecter le calendrier.

Sans fermer totalement la porte, Chuck Hagel n'a pas caché les réticences américaines, évoquant la nécessité pour l'alliance d'«évoluer» tout en réaffirmant l'engagement américain au côté de la Corée du Sud.

«Même si notre alliance n'a jamais été aussi forte qu'aujourd'hui, cela ne signifie pas que nous ne devons pas grandir et mûrir», a-t-il affirmé lors d'un dîner de gala lundi soir.

La présidente Park Geun-hye, qui s'est entretenue lundi avec M. Hagel, a de son côté rappelé que «la paix dans la péninsule coréenne est une nouvelle fois précaire en raison du programme nucléaire du Nord».

La question du transfert du «contrôle opérationnel» en temps de guerre divise la classe politique sud-coréenne.

Les partis de gauche dans l'opposition voyant la situation actuelle comme quasi-coloniale tandis que les conservateurs veulent croire que le commandement américain constitue la meilleure des garanties de l'engagement de Washington pour la défense de la Corée du Sud.