Le président Nicolas Sarkozy est désormais donné par tous les sondages en tête du premier tour de la présidentielle française, achevant un retournement de situation entamé fin février et qui fragilise la position du socialiste François Hollande, donné favori.

À trois semaines du premier tour, le 22 avril, sondeurs et médias estiment désormais que la dynamique a changé de camp.

Un sondage CSA publié tard mercredi accorde une large avance à Nicolas Sarkozy au premier tour, avec 30% des suffrages contre 26% à François Hollande. Le même jour, une enquête TNS-Sofres donnait pour la première fois de la campagne (pour cet institut) le sortant en tête, à 29% contre 28% pour Hollande.

Si le candidat socialiste est toujours favori au second tour prévu le 6 mai, l'écart se réduit: 55-45 pour TNS-Sofres et 53-47 pour CSA. «Début février, on était à 60-40 en faveur de Hollande», rappelle Jérôme Sainte-Marie du CSA.

Pour Édouard Lecerf, directeur général de TNS-Sofres, «même si on peut dire que les candidats sont au coude à coude, la dynamique s'est inversée au profit de Nicolas Sarkozy». L'hebdomadaire de gauche Le Nouvel Observateur confirme: «Au secours, Sarkozy revient!»

Comment expliquer ces nouvelles tendances?

L'institut CSA fait le constat d'une «déception» de certains sympathisants de gauche «attirés par la posture de François Hollande quand il s'était attaqué aux revenus des ménages les plus fortunés (et qui) sont déçus de pas entendre suffisamment d'annonces sociales», selon Jérôme Sainte-Marie.

Il observe aussi un positionnement des électeurs centristes plus favorable à Sarkozy, qui aurait selon eux «plus les qualités d'autorité d'un chef d'État».

Tous s'accordent à souligner l'entrée en campagne «réussie» de Nicolas Sarkozy, depuis la mi-février.

Et si les tueries perpétrées par un jeune djihadiste dans le sud-ouest de la France ont bouleversé le pays sans beaucoup peser politiquement, cette séquence sécuritaire a naturellement favorisé le président en exercice, qui a pu peaufiner l'image de «protecteur» face à la crise ou la violence qu'il avait commencé à véhiculer.

L'émotion passée, Nicolas Sarkozy a repris les rassemblements tambour battant. Il mène une campagne agressive, martelant depuis le début des positions très dures sur l'immigration. «Comment intégrer, comment assimiler, si une vague migratoire incontrôlée vient indéfiniment réduire à néant les efforts de la République ?», a-t-il ainsi lancé mardi en «meeting» à Nantes (nord-ouest).

Comme en 2007, il cherche à siphonner les voix de l'extrême droite, dont la candidate Marine Le Pen est créditée d'environ 15% des voix, pour arriver en tête au premier tour et garder la dynamique de son côté.

Le camp présidentiel, qui a repris espoir en mars, raille désormais la stratégie de François Hollande, qui «ne veut faire campagne que sur l'antisarkozysme», selon sa porte-parole, Nathalie Kosciusko-Morizet.

François Hollande, qui avait tenté de déminer le terrain en assurant qu'il ne s'imaginait pas conserver jusqu'au bout ses 15 points d'écart devant le président sortant, refuse de changer de ligne.

Dans un entretien au journal Le Monde paru jeudi, il répète qu'il veut «rassembler», être un président «constant dans les choix et la durée», et se positionne bien une nouvelle fois en opposition au sortant, dont le «bilan-boulet» est pilonné sans relâche par son état-major.

Face à la remarquable percée du candidat de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon (crédité de 10 à 14%), M. Hollande se borne à rappeler que le premier tour est «décisif» et se refuse à l'attaquer, par crainte de diviser son camp.

Un pari risqué face à un Nicolas Sarkozy «en mouvement», qui donne le sentiment d'imposer ses thèmes (sécurité, immigration) et a encore en réserve un programme qui reste à dévoiler, en principe au début de la semaine prochaine, quand François Hollande a déjà révélé d'un coup un catalogue de mesures fin janvier.