La multiplication des bombardements du régime syrien contre plusieurs fiefs rebelles, qui ont fait plus de 50 morts ces deux derniers jours, a mis à l'agonie la trêve en Syrie au moment où les négociations de paix sont dans l'impasse.

Pour le directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane, la trêve initiée par les États-Unis et la Russie et entrée en vigueur il y a huit semaines « n'existe plus » après de nombreuses violations commises tant par les rebelles que par le régime du président Bachar al-Assad.

Cette trêve était vue comme un premier pas vers un éventuel règlement de ce conflit sanglant qui a fait plus de 270 000 morts depuis mars 2011.

Samedi, les forces du régime syrien ont pilonné les quartiers est de la ville d'Alep tenus par les rebelles causant la mort de 27 civils. Les raids qui ont commencé dès le matin ont notamment visé le très populeux quartier de Boustane al-Qasr, selon un correspondant de l'AFP sur place.

Le plus meurtrier a eu lieu dans la zone de Tariq al-Bab, tuant 12 civils, a affirmé à l'AFP un responsable local de la défense civile.

Au moins neuf autres civils ont été blessés dans d'autres raids, selon la même source.

Samedi, les secouristes s'activaient à sortir les gens bloqués dans les immeubles endommagés par les bombardements. Un volontaire a réussi à évacuer avec une grue un jeune homme portant un enfant dans ses bras d'un étage supérieur d'un immeuble défiguré par les frappes aériennes. À proximité, une camionnette transporte les restes d'un mort.

Après des semaines de calme qui avaient permis aux habitants de reprendre leur souffle, c'est le second jour que les quartiers rebelles situés dans l'est d'Alep sont visés par des raids d'une rare intensité. Vendredi, 25 civils avaient déjà été tués.

« Le cessez-le-feu a pris fin quand la première bombe est tombée sur la ville. Il y a actuellement vingt raids par jour sur Alep car ce régime criminel ne comprend pas le langage des négociations politiques, il ne comprend que celui des bombardements, des morts et des destructions », déclare à l'AFP Mohammad Machahadi, un secouriste de 42 ans.

Au nord-est de Damas, 13 personnes, dont trois femmes et deux enfants, sont mortes samedi dans des bombardements des forces gouvernementales contre Douma, bastion du groupe rebelle Jaich al-Islam, qui était engagé par l'arrêt des hostilités, selon l'OSDH.

Il s'agit du bilan le plus meurtrier à Douma depuis l'instauration de la trêve, selon l'OSDH.

Et dans la province centrale de Homs, deux civils ont été tués dans des raids aériens du régime sur la localité rebelle de Talbissé, selon l'OSDH.

« La trêve n'existe plus, elle est finie », a dit à l'AFP M. Abdel Rahmane. « Il y a des frappes et des combats à travers l'ensemble du pays, d'Alep jusqu'à Damas ».

Il a fait état de « combats féroces dans la Ghouta orientale près de Damas » entre rebelles et forces prorégime.

M. Abdel Rahmane a affirmé qu'il avait cessé d'établir les listes de violations comme aux premières semaines de la trêve, car « maintenant c'est de nouveau la guerre ». « La plupart des régions où la trêve était respectée sont de nouveau le théâtre de combats », a-t-il insisté.

« Impasse diplomatique »

Ces derniers jours, le président américain Barack Obama s'est dit « très inquiet concernant la cessation des hostilités qui s'effiloche » tandis que l'ONU disait la trêve « en grand danger ».

À Genève, les pourparlers pour mettre fin à la guerre sont dans l'impasse.

Ce deuxième round de négociations, qui a débuté le 13 avril, doit théoriquement se poursuivre jusqu'à mercredi, mais aucun progrès n'est à attendre puisque la principale composante de opposition, représentée par le Haut comité des négociations (HCN) a suspendu lundi sa participation « formelle » aux pourparlers.

Il ne reste à Genève que le régime, d'autres groupes d'opposition et une équipe « technique » du HCN.

En dépit de cette situation, l'émissaire de l'ONU pour la Syrie Staffan de Mistura a assuré que les négociations se poursuivraient « sous tous les plans, formels, informels, techniques, ici à l'ONU, ou dans les hôtels ».

« Le refus répété du régime de discuter une transition politique qui exclue le président Assad et l'insistance de l'opposition à demander son départ a conduit à une impasse diplomatique qui rendait la résurgence des violences inévitables », selon un analyste du groupe d'évaluation des risques Soufan.

Dans cette guerre où toutes les composante de la société syrienne se combattent, des représentants gouvernementaux et des responsables kurdes syriens doivent se rencontrer samedi pour mettre fin aux combats qui ont ensanglanté Qamichli, dans le nord-est du pays.