Les rebelles syriens ont mis en garde jeudi contre une «catastrophe humanitaire» s'ils n'obtenaient pas d'armes lourdes pour protéger les zones civiles, après l'intensification des opérations de l'armée aidée par le Hezbollah libanais.

Craignant une propagation du conflit à son pays, le président libanais Michel Sleimane a, pour la première fois, exhorté le Hezbollah chiite, allié indéfectible du régime de Bachar al-Assad, à mettre fin à sa participation aux combats, cruciale dans les récents succès de l'armée syrienne.

À deux jours d'une réunion samedi à Doha de 11 pays soutenant l'opposition, l'Armée syrienne libre (ASL), principale composante de la rébellion, a réclamé des missiles antiaériens et antichars et une zone d'exclusion aérienne.

«Nous avons besoin de missiles sol-air de courte portée MANPAD, de missiles antichars, de mortiers, de munitions (...) de gilets pare-balles et de masques à gaz», a déclaré à l'AFP le porte-parole de l'ASL, Louaï Mokdad.

Il a dit que son groupe «s'engageait à veiller à ce que ces armes ne tombent pas aux mains de groupes incontrôlés ou extrémistes», les Occidentaux refusant jusqu'ici de livrer des armes en exprimant précisément cette crainte.

Le chef de la diplomatie française Laurent Fabius l'a répété en affirmant que son pays excluait de livrer à la rébellion des armes qui pourraient «se retourner» contre lui.

Mais M. Mokdad a prévenu du risque d'«une véritable catastrophe humanitaire» en cas de refus, accusant les troupes du régime de se livrer à des massacres dans les régions qu'elles reprennent.

Bataille près de Damas

Sur ce chapitre humanitaire, la patronne des opérations humanitaires de l'ONU Valerie Amos a insisté une nouvelle fois jeudi auprès du Conseil de sécurité pour que des convois d'aide passent par la frontière turque afin d'élargir l'accès humanitaire en Syrie.

De son côté, le secrétaire d'État John Kerry participera samedi à la réunion des «Amis du peuple syrien» avec d'autres représentants de pays arabes et occidentaux, pour examiner les moyens d'aider les rebelles et les efforts pour réunir une conférence de paix à Genève.

Néanmoins, Moscou, alliée du régime Assad, a affirmé que les Occidentaux avaient refusé de s'engager sur une date concrète, car ils n'étaient pas sûrs de pouvoir faire venir l'opposition qui exige un départ de M. Assad.

Après la reprise par l'armée de plusieurs secteurs rebelles, le porte-parole de l'ASL a assuré que le régime massait des troupes en vue d'une offensive autour de Damas, dans la région d'Alep (nord) et dans le centre.

D'ailleurs, une importante bataille entre armée, appuyée par le Hezbollah, et rebelles, se joue dans les banlieues sud et est de Damas, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Les troupes tentent de reprendre les villes de Zayabiya et Babila, ce qui leur permettrait de couper l'approvisionnement des insurgés retranchés dans le sud de Damas.

Plusieurs quartiers du sud et de l'est de la capitale, dont Qaboun, Barzé, Jobar, Hajar al-Aswad et Qadam étaient eux aussi pris sous le feu de l'armée.

Dans un communiqué, l'opposition a dit craindre que Qaboun et Barzé ne soient pris d'assaut, redoutant «un nouveau massacre». «Après six mois de siège et avec le soutien du Hezbollah (ces secteurs) sont en danger et 40 000 civils souffrent du manque de nourriture et de médicaments».

Selon militants et rebelles, le Hezbollah se déploie désormais aussi dans le nord, en préparation d'un assaut contre la deuxième ville du pays, Alep.

Journée du réfugié

Affirmant que «l'intervention du Hezbollah entraîne des tensions au Liban», le président Sleimane a prévenu que «s'il (le Hezbollah) participe à la bataille d'Alep (...) cela attisera davantage les tensions».

«Ils doivent rentrer au Liban», a encore indiqué le président libanais dont le pays, sous tutelle syrienne pendant 30 ans, est profondément divisé entre pro et anti-Assad.

À Alep, l'OSDH a dénoncé une situation sanitaire «effrayante» dans la principale prison où des cas de tuberculose et de gale ont été signalés parmi les milliers de détenus.

Sur un autre plan, l'UNESCO a inscrit sur la liste du patrimoine mondial en danger six sites menacés par les combats, en particulier la vieille ville d'Alep, qui a subi des dommages considérables depuis le début en mars 2011 de la révolte contre le régime devenue guerre civile.

Selon l'ONU, plus de 93 000 personnes ont été tuées dans le conflit qui a également poussé à la fuite 1,6 million de réfugiés et 4,25 millions de déplacés, dont le nombre ne cesse de croître.

À l'occasion de la journée du réfugié, l'opposition a appelé la communauté internationale à trouver «des solutions pratiques qui arrêteraient l'effondrement de la Syrie et permettraient aux réfugiés de rentrer chez eux».