Les forces de sécurité syriennes pourraient avoir commis des crimes contre l'humanité en mai lors du siège de la ville Talkalakh, près de la frontière libanaise, a déclaré mercredi Amnesty International, qui cite des témoignages faisant état de morts en détention, tortures et arrestations arbitraires.

Talkalakh a été envahie par des chars de l'armée, les forces de sécurité et des miliciens pro-régime après des semaines de manifestations appelant au départ du président Bachar el-Assad. Selon certaines sources, la répression aurait fait jusqu'à 36 morts dans la ville. Des milliers d'habitants ont fui vers le Liban pour échapper à l'offensive.

Amnesty appelle le Conseil de sécurité de l'ONU à soumettre le cas de Talkalakh à la Cour pénale internationale (CPI). Le rapport de l'organisation de défense des droits de l'homme pourrait accentuer la pression internationale sur Damas, qui poursuit la répression contre le mouvement de contestation dans le pays.

«Les récits de témoins que nous avons recueillis sur les événements à (Talkalakh) décrivent une situation très préoccupante de violations systématiques et ciblées pour écraser la contestation», souligne Philip Luther, directeur-adjoint d'Amnesty pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord.

Selon des témoins, les forces syriennes ont tiré sur des familles qui fuyaient et sur des ambulances. Amnesty souligne qu'au moins neuf personnes sont mortes en détention, dont huit grièvement blessées après avoir reçu l'ordre de sortir d'une maison.

Certains parents qui ont identifié les corps de leurs fils ont été contraints de signer un document affirmant qu'ils avaient été tués par des bandes armées, précise Amnesty, qui a mené des interviews au Liban et par téléphone avec une cinquantaine de personnes.

«La plupart des crimes décrits dans ce rapport seraient du ressort de la Cour pénale internationale, note M. Luther. Mais le Conseil de sécurité de l'ONU doit d'abord saisir le procureur de la Cour sur la situation en Syrie.»

Quatre pays européens ont présenté une projet de résolution au Conseil condamnant la répression en Syrie, mais la Russie et la Chine ont averti qu'ils utiliseraient leur droit de veto pour empêcher l'adoption du texte.

Les forces syriennes auraient tué plus de 1400 personnes, des manifestants non armés pour la plupart, depuis la mi-mars, selon des militants des droits de l'homme. Damas conteste ce bilan et attribue la responsabilité des troubles à des «voyous armés» et des conspirateurs étrangers.