Pour la première fois depuis des décennies, un parti politique a vu le jour en Libye: né cette semaine à Benghazi dans l'Est contrôlé par les rebelles grâce à l'initiative d'expatriés libyens, il se veut un précurseur dans la voie vers la démocratie.

«Nous nous appelons le Parti de la Nouvelle Libye parce que tout a été détruit», déclare Ramadan Ben Amer, l'un des cofondateurs du parti dans un entretien à l'AFP. Le colonel Mouammar «Kadhafi dit qu'il a construit la Libye pierre après pierre, mais, notamment à Benghazi, il l'a détruite pierre après pierre».

D'après cet homme de 53 ans, installé aux Émirats arabes unis, 2000 personnes ont déjà rejoint la nouvelle formation. La plupart habitent Benghazi, sa ville natale, et Derna, celle de Rajad Mabrouk, 65 ans, l'autre fondateur du mouvement, qui vit à Dallas, au Texas.

La Nouvelle Libye, précise-t-il, est soutenue par quelque 20 000 expatriés vivant aux États-Unis, au Canada ou en Allemagne.

Ingénieur en pétrochimie formé en Californie, Amer souligne que son parti souhaite une démocratie fédérale, avec une séparation claire entre les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, sur le modèle américain.

Selon lui, il s'agit du meilleur système pour assurer le développement du tourisme et la gestion des ressources pétrolières.

«Réformer et développer le secteur pétrolier, de même que les énergies alternatives», notamment solaires dans ce pays ensoleillé 365 jours par an, fait partie des priorités du nouveau mouvement, suivies du système de santé et de la sécurité sociale.

Le Parti de la Nouvelle Libye souhaite l'abrogation de tous les impôts, au premier rang desquels l'impôt sur les revenus.

Sa plate-forme, comme souligné dans un dépliant en papier glacé, promeut également l'égalité des droits, la participation des femmes et des jeunes dans la société, la protection des minorités et la limitation du rôle des tribus, des «entités sociales» qui «ne devraient pas être considérées comme des corps politiques».

La Libye, secouée depuis cinq mois par une révolte populaire contre Mouammar Kadhafi qui s'est transformée en conflit armé, devrait devenir un État musulman séculier, où la relation à Dieu serait considérée comme une affaire personnelle, ajoute Amer.

Son groupe est, selon lui, le premier à se présenter comme un parti politique (hezb en arabe) en Libye. Ces derniers sont interdits depuis 1977 dans le pays, dirigé d'une main de fer par le colonel Kadhafi depuis plus de 40 ans.

«Il existe des associations, notamment caritatives, des clubs qui portent en eux des germes de partis politiques, mais aucun ne s'est présenté en utilisant le mot «parti»», explique-t-il.

«Il s'agit du premier parti politique à se déclarer», confirme à l'AFP Abeir Imneina, experte politique à Benghazi.

Plusieurs groupes de travail ayant émergé autour du Conseil national de transition (CNT), organe politique de la rébellion basé à Benghazi, pourraient, selon elle, le faire également dans un futur proche. Un certain nombre tiennent déjà des réunions pour délimiter leurs objectifs et recruter des membres.

«Les déclarations sont un premier pas qui aide à vous faire connaître», dit-elle.

Pour autant, souligne Abeir Imneina, «il n'y a pas encore de loi régissant les partis politiques et aucun parti ne peut donc exister de manière officielle pour le moment».

Aucune élection n'est d'ailleurs prévue pour l'heure à Benghazi, où siège le CNT, instance reconnue par des dizaines de pays comme le «représentant légitime» de la Libye.

Un porte-parole du CNT a indiqué n'avoir «jamais entendu parler» du Parti de la Nouvelle Libye. Mais selon lui, d'autres annonces de ce type devraient avoir lieu rapidement, dont certaines à caractère anecdotique.