Les Européens, Français en tête, ont commencé jeudi à mettre en place un pont aérien pour évacuer de Tunisie des milliers d'Égyptiens ayant fui la Libye, afin d'éviter chaos et épidémies.

Signe de l'engagement européen, la Commissaire européenne Kristalina Georgieva, chargée de la coopération internationale, de l'aide humanitaire et de la réaction aux crises, a annoncé jeudi depuis le sud tunisien le triplement de l'aide financière de l'UE, à 30 millions d'euros.

Cet argent, a précisé la Commission, servira à répondre «aux besoins les plus urgents de la population qui traverse les frontières libyennes»: nourriture, tentes, couvertures, aide médicale...

Mme Georgieva s'est rendue au poste frontière de Ras Jedid en compagnie du ministre hongrois des Affaires européenne Eniko Gyori (La Hongrie assure la présidence de l'UE).

Une équipe médicale française d'une vingtaine de médecins et infirmiers est arrivée à l'aéroport de Djerba, dans le sud de la Tunisie, avec pour objectif d'évacuer par air et par mer quelques 5 000 Égyptiens.

Trois avions gros porteurs ont été mobilisés pour faire des rotations sur le Caire. Ils feront chacun deux aller et retour jeudi. Le même ballet est prévu vendredi et samedi.

Le premier vol a décollé jeudi après-midi avec 168 réfugiés à bord.

Selon l'ONU, le pont aérien international représentait un total de 58 vols jeudi.

Parallèlement, le porte-hélicoptère français Mistral était attendu samedi dans le port de Djerba pour y embarquer quelque 800 Egyptiens. Il mettra trois jours pour rallier le Caire.

Premiers bénéficiaires de cette «fuite vers l'Egypte», des centaines d'Egyptiens avaient commencé à quitter jeudi matin la frontière tunisienne avec la Libye à bord de dizaines de bus. Direction: l'aéroport de Djerba et le port de Zarzis, a constaté une journaliste de l'AFP.

D'interminables files d'attente s'étiraient le long de la route bordant le camp de Choucha, à 7 kilomètres du poste-frontière de Ras Jédir, et où quelque 15.000 personnes sont accueillies par l'armée tunisienne, le Croissant-Rouge et l'ONU, qui ont installé des centaines de tentes sur le site.

Dans la matinée, un haut responsable de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) avait insisté à Tunis sur l'urgence à agir pour éviter un risque croissant d'épidémies.

«Nous avons une concentration de plusieurs dizaines de milliers de personnes. Tous les ingrédients sont là pour une explosion épidémique», s'est alarmé M. Eric Laroche, sous-secrétaire de l'OMS pour les interventions sanitaires en cas de crise, juste de retour d'une mission dans le sud tunisien.

Selon le responsable du bureau d'information de l'ONU à Tunis, quelque 90.000 personnes ont traversé la frontière tuniso-libyenne depuis le 20 février, 7.561 rien que mercredi.

Le ministre allemand des Affaires étrangères Guido Westerwelle a annoncé l'envoi de trois navires militaires pour rapatrier en Egypte quelque 4.000 réfugiés, essentiellement des Egyptiens.

L'Espagne a également prévu d'affrêter un avion chargé d'aide humanitaire qui transportera ensuite vers l'Egypte, en plusieurs voyages, des réfugiés égyptiens.

De son côté le Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) a indiqué jeudi qu'il comptait doubler les capacités d'accueil du camp à la frontière tuniso-libyenne, de 10.000 à 20.000, a déclaré à l'AFP un porte-parole, Adrian Edwards. Pour lui, «décongestionner (la frontière) est une priorité».

Entre 8.000 et 10.000 ressortissants du Bangladesh sont passés mercredi en Tunisie, selon le porte-parole du HCR.

L'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a indiqué jeudi qu'elle allait transférer 1.700 personnes de Tunisie vers l'Egypte.

Enfin l'Algérie a débloqué 200 tonnes d'aide et le Croissant-Rouge algérien a offert d'y installer un camp pour 10.000 personnes.