Il n'y a pas eu un 11 septembre en 2001 mais une multitude de 11 septembres vécus différemment du Québec aux États-Unis en passant par l'Égypte, l'Afghanistan, la Palestine. Hier, ce sont ces visions récoltées aux quatre coins du monde que quatre vétérans chroniqueurs de La Presse ont mis en commun devant plus de 350 personnes réunies à Montréal.

On a parfois l'impression que tout a été dit sur cet événement. Mais 10 ans plus tard, les questions étaient nombreuses et relançaient sans cesse la discussion chez les gens rassemblés à l'Astral, au coeur du Quartier des spectacles de Montréal, pour ce volet de la série des Rencontres La Presse.

Correspondant de La Presse à New York, Richard Hétu était à Montréal ce jour-là. Loin de sa conjointe qui, elle, travaillait à Manhattan quand les avions ont frappé les tours.

«Ç'a pris un certain moment avant de savoir qu'elle était toujours là. Et quand je l'ai revue, ç'a été un grand moment d'émotion», a-t-il raconté.

Accouru à New York en voiture, il a été marqué par les immenses files de gens qui attendaient pour mettre la main sur la prochaine édition historique du New York Times.

«Et ce silence... incroyable», s'est-il souvenu.

Allergique à la couverture des grands événements qui font la manchette, Pierre Foglia avait fait une exception ce jour-là.

«Je me suis dit, il ne faut pas que tu déconnes. Cette fois, ce n'est pas un événement, c'est l'Événement», a-t-il expliqué.

L'image la plus marquante de cette journée demeure pour lui celle de deux personnes plongeant vers la mort, du haut du World Trade Center, en se tenant la main.

«L'événement humain, il est tout là», croit-il.

Interrogés par l'animateur Patrick Lagacé pour savoir s'il y a eu des «gagnants» du 11-Septembre, les participants ont eu des réponses mitigées.

«Les Afghans, eux, ont drôlement perdu», a indiqué Michèle Ouimet, une habituée des reportages dans cette région du monde, qui prévoit une longue et pénible guerre civile pour des années à venir après le départ des troupes occidentales.

Agnès Gruda, qui a beaucoup écrit sur le Moyen-Orient, a pour sa part constaté qu'en des endroits comme l'Égypte, le 11-Septembre a marqué la fin de la promotion de la violence par une importante frange de militants islamistes. Ceux-ci se sont repliés sur les moyens démocratiques pour faire avancer leur cause. «C'est le cas pour l'Égypte, ça ne l'est pas pour d'autres endroits comme le Pakistan», concède-t-elle.

Pierre Foglia, lui, a toutefois souligné à quel point les gens qu'il a rencontrés dans ses voyages en Irak faisaient peu de cas de cette tragédie qui a tant marqué l'Occident. L'un d'eux lui a expliqué la raison de cette banalisation. «Regarde, je vais t'expliquer. Combien il y a eu de morts à New York, 3000? Nous, en 2005-2006, on avait 3000 morts par mois. On ne pleure pas trop sur les 3000 morts de 2001. C'est triste, mais on continue», lui a dit l'homme.