(Boa Vista) Dans un hôpital de l’Amazonie brésilienne, des enfants yanomami récupèrent. Le nombre élevé de cas graves de dénutrition et de paludisme parmi les jeunes a poussé le nouveau gouvernement de gauche à déclarer une urgence sanitaire.

À l’hôpital pour enfants San Antonio de Boa Vista, situé dans l’État de Roraima, dans le nord du Brésil, un groupe d’enfants à demi nus aux bras et aux jambes très maigres somnole dans des hamacs bleus.  

Certains ont été hospitalisés pour pneumonie, paludisme, gastro-entérites ou morsures de serpents dans cet hôpital public où sont soignés 59 mineurs autochtones.

Parmi eux 45 sont des Yanomami, dont huit ont été placés en soins intensifs, a indiqué vendredi la mairie de Boa Vista à l’AFP, qui gère l’hôpital.

« Malheureusement, nos enfants souffrent », a expliqué à l’AFPTV Marcelo Yanomami, originaire de la communauté d’Oroxofi, près de la frontière brésilienne avec le Venezuela.

Sa fille, âgée d’un an et cinq mois, a été hospitalisée pendant sept jours pour malnutrition. Elle ne pèse que 4,9 kilos, à peine plus qu’un nouveau-né.

« Là où je vis, il n’y a pas de nourriture […] Il n’y a pas de bananes. Il n’y a pas de jeu », raconte Marcelo, qui affirme que la malnutrition parmi la population yanomami est un « vieux problème, pas un problème récent ».

« Nous n’avons pas autant d’adultes qu’avant (ce qui réduit la main-d’œuvre disponible pour la chasse). Aujourd’hui, ils sont tous trop faibles pour travailler », explique-t-il.

L’hôpital San Antonio est le seul de l’État de Roraima qui soigne les enfants jusqu’à douze ans.

Quelque 30 400 autochtones vivent sur les terres yanomami, à cheval sur les États de Roraima et d’Amazonas, mais également sur une partie du Venezuela voisin.

« La grande majorité (des enfants) arrive en souffrant d’une dénutrition de modérée à grave, compliquée par des infections comme une pneumonie, le paludisme ou une gastro-entérite », explique à l’AFP-TV, le Dr Eugenio Patrico, pédiatre à l’hôpital San Antonio.  

« À cause de la dénutrition, ils ont très peu de réserves pour combattre les infections », explique le médecin, « donc les répercussions sont plus importantes et certains doivent aller en soins intensifs ».  

Scènes « inhumaines »

La majorité des enfants autochtones qui arrivent ici ont moins de huit ans et la moitié du poids normal pour leur âge, parfois moins. « Ils arrivent en grand état de fragilité, en raison de la dénutrition associée aux infections ».

Pour arriver jusque-là, beaucoup d’enfants ont été transportés par avion depuis des zones reculées de la forêt amazonienne.

Si l’hôpital San Antonio accepte les cas les plus graves, les autres jeunes patients et adultes sont traités à la Casai, un dispensaire de Boa Vista.

Un hôpital de campagne a été installé vendredi par l’armée, qui a monté des tentes dans la cour de la Casai, afin de faire face à la crise sanitaire.

Le ministère de la Santé a annoncé la semaine dernière la mort de 99 enfants âgés de moins de cinq ans en 2022 dans le territoire yanomami isolé au milieu de la forêt vierge. Ils ont succombé à la dénutrition, à la pneumonie ou encore au paludisme.

La police brésilienne a ouvert une enquête pour « génocide », visant des agents publics et des responsables du secteur de la santé du gouvernement du président d’extrême droite Jair Bolsonaro, qui a quitté le pouvoir en décembre.

Le nouveau président Luiz Inacio Lula da Silva, investi le 1er janvier, s’est rendu récemment à Boa Vista. « Ce que j’ai vu m’a ébranlé », avait-il indiqué, évoquant des scènes « inhumaines ».

Les populations des terres yanomami, censées être inviolables et où toute exploitation minière est interdite, ont du mal à se nourrir en raison de la destruction de la forêt tropicale où elles trouvent normalement leurs moyens de subsistance.

Selon les chefs yanomami, quelque 20 000 chercheurs d’or clandestins ont envahi leur territoire, tuant des autochtones, agressant sexuellement des femmes et des adolescentes et contaminant leurs rivières avec le mercure qu’ils utilisent pour séparer l’or des sédiments.

Mercredi, la Cour suprême a annoncé avoir identifié des indices de publication de fausses informations par le gouvernement Bolsonaro sur la situation des Yanomami.