(Bogota) La presse colombienne a révélé jeudi des enregistrements de réunions de campagne de Gustavo Petro à la présidentielle du 19 juin, mettant dans l’embarras le candidat de gauche tandis que son rival, l’indépendant Rodolfo Hernandez suspendait toutes ses activités, car craignant pour « sa vie ».

L’hebdomadaire Semana a diffusé dans la nuit des enregistrements « inédits et secrets », audio comme vidéo, de réunions de l’équipe de campagne de M. Petro.

Ces enregistrements sont « parvenus à la rédaction via des sources anonymes et sont publiés dans l’intérêt national », explique Semana, qui mène campagne contre M. Petro depuis des semaines et les diffuse soigneusement édités à charge.

Ils « démontrent le plan pour détruire politiquement et personnellement des rivaux tels que Federico Gutierrez (candidat de droite, éliminé au 1er tour), Sergio Fajardo et Alejandro Gaviria (deux candidats centristes), et ainsi les écarter de la course électorale », accuse l’hebdomadaire.  

Ces « Petrovidéos », comme elles ont été déjà surnommées, révèlent la teneur de discussions stratégiques, visiblement avant le premier tour, du premier cercle du candidat de gauche.

Le sénateur Roy Barreras y parle de « faire exploser » et « décrédibiliser » les rivaux centristes de Petro, un autre participant parle de « générer du contenu » sur les réseaux sociaux pour « attaquer » Gutierrez, notamment sur des « relations avec le trafic » de drogue.  

A dix jours du second tour, et alors que la campagne tournait déjà au pugilat, ces enregistrements ont été immédiatement exploités par les adversaires de M. Petro.

Depuis Miami, aux États-Unis, où il est en campagne, son rival, Rodolfo Hernandez a annoncé l’annulation de toutes ses apparitions publiques jusqu’au scrutin, disant craindre pour « sa vie », et plus particulièrement un assassinat « au couteau ».

Photo EVA MARIE UZCATEGUI, Agence France-Presse

Rodolfo Hernandez

« J’ai la certitude que ma vie est en danger. On peut s’attendre à tout, jusqu’au pire, de ce groupe politique qui se comporte comme un bande criminelle » et « est prêt à tout pour arriver au pouvoir », a fustigé M. Hernandez.  

« C’est ça que la Colombie veut comme président ? Le pays ne mérite pas d’être gouverné par une telle bande de criminels », a-t-il encore lancé sur Twitter.

Un conseiller du candidat Petro a dénoncé dans « ces fuites d’audios et de vidéos de conversations privées des attaques directes contre la démocratie », évoquant des déclarations « décontextualisées ».

Sur Twitter, le candidat de gauche, qui lui-même ne s’exprime à aucun moment dans ces audios et vidéos pirates, a exigé la diffusion de « la totalité de ces heures d’enregistrements », afin notamment que les Colombiens « puissent juger de mes actes les plus intimes en politique ».

Après avoir dénoncé dans un premier temps des enregistrements « illégaux fournis par le gouvernement » et exigé « une enquête par une commission indépendante », M. Petro a appelé son rival « à venir débattre en sécurité à la télévision » pour « donner au peuple le débat qu’il mérite ».