(Lima) Le Parlement du Pérou dominé par l’opposition a entamé lundi des débats sur la procédure de destitution engagée contre le président Pedro Castillo pour « incapacité morale », avant un vote prévu en fin de journée.  

Il s’agit de la deuxième fronde parlementaire à laquelle fait face le président de gauche élu en juillet dernier.  

En décembre, le Parlement unicaméral a rejeté une initiative similaire dont l’issue ce lundi est tout aussi incertaine car l’opposition ne dispose pas des 87 voix requises par la Constitution pour destituer un président.

Sur les 130 parlementaires, l’opposition de droite peut en rassembler environ 80 dans son giron. Le parti présidentiel marxiste Peru libre (37 élus) et apparenté forme un groupe de 50 parlementaires.

L’opposition accuse le président Castillo d’être intervenu dans une affaire de corruption présumée opérée par son entourage et d’avoir commis une « trahison » en se déclarant ouvert à un référendum sur un débouché sur l’océan Pacifique pour le voisin bolivien enclavé.

Elle lui reproche également les crises ministérielles à répétition et la formation de quatre gouvernements en huit mois, fait inédit au Pérou.

La session parlementaire s’est ouverte par des questions au président Castillo vêtu d’un costume traditionnel andin gris ceint de l’écharpe présidentielle rouge et blanche.

Il a jugé « non valable » la motion engagée contre lui car « elle ne contient pas un seul élément qui la soutienne valablement », estimant qu’elle est réduite à « une compilation de versions d’un secteur de la presse », sous-entendu proche de l’opposition.

Il a ensuite quitté l’hémicycle et son avocat, José Félix Palomino, a assuré sa défense : « il n’y a aucune preuve qui lie directement le président à un quelconque acte de corruption », a-t-il dit.

À l’extérieur du palais législatif, des rassemblements pro et anti Castillo se sont formés.

Si M. Castillo est démis de ses fonctions, il sera remplacé par sa vice-présidente, Dina Boluarte, mais si celle-ci démissionne dans la foulée, ce sera à la cheffe du Parlement, Maria del Carmen Alva, de prendre la présidence.

Il s’agit de la sixième motion de destitution du Parlement péruvien pour « incapacité morale » contre un président en exercice depuis 2017, après Pedro Pablo Kuczynski (droite) en 2018 et Martin Vizcarra (centre) en 2020.

L’éviction de M. Vizcarra avait déclenché des manifestations violemment réprimées qui ont fait deux morts et une centaine de blessés. Son départ avait conduit le Pérou à avoir trois présidents en cinq jours.

Ce choc des pouvoirs entre l’exécutif et le législatif, une constante au Pérou, a suscité l’inquiétude de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) qui appellent au respect de la « volonté du peuple ».

Un sondage de l’Institut Ipsos publié lundi révèle que 79 % des Péruviens désapprouvent les actions d’obstructions du Parlement, bien que la défiance envers le président Castillo reste très forte (66 %).