(Boa Vista) Le président vénézuélien Nicolas Maduro a « anéanti » son propre peuple et « doit partir », a affirmé vendredi le secrétaire d’État américain Mike Pompeo, s’attirant une riposte cinglante du dirigeant socialiste qui l’a accusé d’être un « va-t-en-guerre ».

En tournée pour quatre jours en Amérique du Sud, le chef de la diplomatie américaine était vendredi au Guyana et au Brésil, deux pays limitrophes du Venezuela. Visitant un camp de réfugiés vénézuéliens dans la ville brésilienne de Boa Vista (nord-ouest), il a mis l’accent sur la situation difficile des quelque 5 millions de Vénézuéliens qui ont fui leur pays.

« Les gens avec qui j’ai parlé ne veulent qu’une chose, c’est rentrer chez eux, dans un Venezuela démocratique, apaisé et souverain, où leurs enfants peuvent travailler », a déclaré le secrétaire d’État.

Plus tôt dans la journée, M. Pompeo a estimé, lors d’une conférence de presse avec le président du Guyana Irfaan Ali, que « le régime de Maduro a anéanti le peuple du Venezuela » et que « Maduro est un narcotrafiquant sous le coup d’une inculpation. Cela signifie qu’il doit partir ».

PHOTO AGENCE FRANCE-PRESSE

Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo était de passage au Guyana, vendredi.

Washington, tout comme près de soixante autres pays, reconnaissent le leader de l’opposition Juan Guaidó, président du Parlement qui s’est autoproclamé début 2019 président par intérim. Ce dernier qualifie Nicolas Maduro d’« usurpateur » et de « dictateur » depuis la présidentielle « frauduleuse » de 2018 qui lui a permis de se maintenir au pouvoir.

Washington exerce sur le régime vénézuélien une pression économique et diplomatique de plus en plus forte à coups de sanctions pour tenter de l’évincer. En mars dernier, le département américain de la Justice a ainsi inculpé Nicolas Maduro et plusieurs de ses proches pour « narco-terrorisme ». Et le mois dernier, les États-Unis ont saisi la cargaison de quatre navires-citernes qui transportaient du pétrole iranien à destination du Venezuela.

Au Brésil, M. Pompeo et son homologue brésilien Ernesto Araujo ont répété leur soutien à M. Guaidó. « Il ne s’agit pas seulement de soutenir un jeune et courageux leader, il s’agit aussi soutenir la Constitution vénézuélienne et ses autorités légitimes », a insisté M. Araujo.

Mais Nicolas Maduro continue de jouir du soutien de l’armée, clef de voûte du système politique vénézuélien, ainsi que de Cuba, de la Russie et de la Chine, autant d’éléments qui lui ont permis de se maintenir au pouvoir.

Et le président du Venezuela ne s’est pas privé de répondre au secrétaire d’État américain, estimant que « la tournée va-t-en-guerre » de M. Pompeo en Amérique latine avait « échoué ».

« Mike Pompeo mène une tournée va-t-en-guerre contre le Venezuela mais cela se retourne contre lui. Il a échoué dans toutes ses tentatives pour que les gouvernements du continent s’organisent et fassent la guerre au Venezuela », a déclaré M. Maduro à la télévision.

Mike Pompeo a débuté sa tournée au Suriname, avant d’aller au Guyana voisin puis au Brésil, où il a aussi rencontré le président d’extrême droite Jair Bolsonaro. Le secrétaire d’État américain est attendu ensuite en Colombie, dont le gouvernement soutient également la politique américaine à l’encontre du Venezuela.

Élections législatives controversées

Caracas prévoit d’organiser des élections législatives le 6 décembre, scrutin boycotté par une partie de l’opposition.

L’Union européenne et plusieurs États sud-américains ont demandé au président vénézuélien de retarder le scrutin, une possibilité rejetée par M. Maduro, qui estime la chose « impossible » pour des raisons constitutionnelles.

Caracas avait invité, le 2 septembre, l’ONU et l’UE à envoyer des observateurs aux législatives. Mais le Haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères, Josep Borrell, a plaidé pour un report, estimant que les conditions pour l’envoi d’une mission d’observation n’étaient pas réunies.

Le ministère brésilien des Affaires étrangères a pour sa part appelé la communauté internationale à ne pas soutenir ces élections, convoquées par « le régime dictatorial » de Nicolas Maduro, à l’origine de « possibles crimes contre l’Humanité », citant un récent rapport de l’ONU.

« Le Brésil considère qu’un régime comme celui de Maduro n’a aucune légitimité pour appeler à un processus électoral équitable », a estimé le ministère dans un communiqué.

Une équipe d’enquêteurs de l’ONU a assuré mercredi dans un rapport avoir trouvé des preuves de crimes contre l’humanité au Venezuela et dit avoir de « bonnes raisons de penser que le président » ainsi que le ministre de l’Intérieur et celui de la Défense « ont ordonné ou contribué à commanditer les crimes avérés ».