La Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme a une fois de plus critiqué les sanctions contre le Venezuela, en ciblant en particulier les États-Unis, estimant qu'elles pouvaient «aggraver» la crise qui frappe ce pays latino-américain.

Le discours de Michelle Bachelet intervient au lendemain de l'annonce de nouvelles sanctions par le Trésor américain.

«L'ampleur et la gravité des crises dans les domaines alimentaire, sanitaire et des services de base n'ont pas été pleinement reconnues par les autorités (vénézuéliennes), de sorte que les mesures qu'elles ont adoptées ont été insuffisantes», a estimé Mme Bachelet devant le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU.

Mais, a-t-elle ajouté, «bien que cette crise sociale et économique dévastatrice ait commencé avant l'imposition des premières sanctions économiques en 2017, je suis préoccupée par le fait que les récentes sanctions sur les transferts financiers liés à la vente de pétrole vénézuélien aux États-Unis puissent contribuer à aggraver la crise économique, avec des répercussions possibles sur les droits fondamentaux des personnes et sur leur bien-être».

Début mars, Mme Bachelet avait déjà dénoncé les sanctions internationales contre le Venezuela, sans toutefois viser un pays en particulier.

Les États-Unis et une cinquantaine d'États ont reconnu l'opposant vénézuélien et président de l'Assemblée nationale Juan Guaidó comme président par intérim du Venezuela, déniant toute légitimé au régime de Nicolas Maduro.

Pour accroître la pression, Washington impose au Venezuela des sanctions économiques et a décrété un embargo sur le pétrole, exportation cruciale pour l'économie du pays, qui doit entrer en vigueur le 28 avril.

Les États-Unis ne sont pas membres du Conseil des droits de l'Homme, mais Carrie Filipetti, secrétaire d'État adjointe aux affaires interaméricaines, de passage mardi à Genève, a indiqué aux journalistes que les sanctions américaines n'avaient pas pour objectif de nuire à la population du Venezuela.

«Nous avons essayé de cibler nos sanctions autant que possible afin qu'elles puissent affecter le régime tout en préservant les Vénézuéliens autant que possible», a-t-elle dit.

Espace démocratique «réduit»

Mme Bachelet a appelé mercredi à trouver une «solution politique» à la crise vénézuélienne, tandis que son bureau a envoyé une «mission technique» dans le pays en vue d'une éventuelle visite de la Haut-Commissaire.

Le Haut-Commissariat doit publier en juin un rapport sur la situation au Venezuela, mais Mme Bachelet a d'ores et déjà dénoncé mercredi «le rétrécissement de l'espace démocratique, en particulier la criminalisation continue des manifestations pacifiques et des dissidents».

«Dans le contexte de la dernière vague de manifestations antigouvernementales [...] au cours des deux premiers mois de cette année, mon bureau a documenté de nombreuses violations des droits humains et des abus commis par les forces de sécurité et les groupes armés progouvernementaux», a expliqué Mme Bachelet, citant «le recours excessif à la force, des meurtres, des détentions arbitraires et l'usage de la torture».

Le Haut-Commissariat a ainsi enquêté sur les informations faisant état d'exécutions extrajudiciaires par les forces de sécurité. En 2018, les forces spéciales de sécurité vénézuéliennes ont tué au moins 205 personnes et 37 autres auraient été tuées en janvier 2019 à Caracas, a précisé Mme Bachelet.  

L'ambassadeur vénézuélien auprès du Conseil, Jorge Valero, a soutenu que le Venezuela reconnaissait le «droit à manifester», mais a expliqué que les récentes manifestations étaient des «actes de vandalisme et criminels [...] promus par un secteur violent de l'opposition financé par l'extérieur».