Plus de 300 détenus, dont celui qu'on soupçonne d'être le chef d'un dangereux gang de ravisseurs, se sont évadés dimanche d'une prison à sécurité maximale construite par le Canada en Haïti.

À la suite du séisme de janvier 2010, le Canada avait fait de la prison de Croix-des-Bouquets son «projet phare» dans la reconstruction d'Haïti, en y investissant 6 millions de dollars. Ottawa voulait faire de ce pénitencier «un modèle d'établissement en ce qui a trait aux conditions de sécurité, d'hygiène et de santé et au respect des droits des prisonniers».

Dimanche, la réputation du centre de détention, décrit comme le plus moderne d'Haïti, a été mise à mal quand un commando de 10 à 15 hommes armés y a mené une spectaculaire évasion, selon des témoins interrogés par les médias locaux. Deux gardes ont été blessés par balles, alors que six employés de la prison ont été pris en otage. La police haïtienne a précisé que l'opération aurait été organisée de l'intérieur, avec la complicité de gardes.

Si cette complicité devait s'avérer, l'évasion serait doublement gênante pour le Canada. En plus de construire la prison, le pays a en effet assuré la formation des gardes haïtiens. Service correctionnel Canada a indiqué à La Presse qu'il n'a plus de personnel à la prison de Croix-des-Bouquets.

L'objectif de cette audacieuse évasion était de libérer un présumé chef de gang incarcéré depuis près de deux ans, Clifford Brandt, a affirmé un porte-parole de la police haïtienne, Garry Desrosiers. Le gouvernement haïtien offre maintenant une récompense de 1 million de gourdes, soit l'équivalent de 25 000 $, pour sa capture. La collaboration de la République dominicaine et d'Interpol a également été demandée pour éviter que le fugitif quitte le pays.

«Nous n'allons ménager aucun effort pour retrouver Clifford Brandt et les autres prisonniers évadés», a déclaré lundi le premier ministre haïtien, Laurent Lamothe.

Clifford Brandt n'est en effet pas le seul à avoir pris la clé des champs. Le tiers des détenus, soit 329 personnes, a profité de la commotion pour s'évader. Seulement 10 d'entre eux ont été capturés depuis, a indiqué la Police nationale haïtienne (PNH).

Officiellement, la prison a été construite pour accueillir 768 prisonniers, mais elle en comptait tout près de 900 au moment de l'évasion. Le pénitencier - qui devait ouvrir ses portes à l'été 2010, mais dont l'inauguration n'a eu lieu qu'en octobre 2012 - avait pourtant été construit pour mettre fin à la surpopulation carcérale. Le Canada avait décidé d'en payer la construction afin de contribuer à la reconstruction du système carcéral haïtien, durement éprouvé par le séisme de janvier 2010.

Clifford Brandt est soupçonné d'être la tête dirigeante d'un important réseau de kidnappeurs qui sévissait à Port-au-Prince. Il a été arrêté en octobre 2012 après l'enlèvement de deux enfants d'un riche entrepreneur haïtien. Selon la police haïtienne, il aurait avoué avoir orchestré leur enlèvement et mené les policiers à l'endroit où les deux enfants étaient détenus en captivité. Quinze autres membres de ce présumé gang de ravisseurs ont été arrêtés depuis.

- Avec Associated Press