Un mémorial dédié aux personnes assassinées ou disparues au cours des dernières années en raison de la violence liée au crime organisé a été inauguré vendredi à Mexico, plusieurs mois après sa construction par le précédent gouvernement et en dépit du rejet d'une partie des représentants des victimes.

«C'est un mémorial non seulement pour les personnes qui s'en sont allées, mais aussi pour celles qui restent», a déclaré l'entrepreneur Alejandro Marti, père d'un adolescent enlevé et assassiné en 2008, fondateur de l'organisation SOS Mexique.

En l'absence du président mexicain Enrique Peña Nieto, en déplacement en Asie, le ministre de l'Intérieur, Miguel Osorio Chong a souligné pour sa part que «ce lieu sert à nous rappeler que nous devons accélérer les efforts pour fermer tous les espaces à la violence et à l'impunité».

Le poète Javier Sicilia, qui a perdu un fils assassiné par un groupe criminel en 2011 et fondé ensuite le Mouvement pour la Paix était absent. Il a rejeté ce mémorial parce qu'il ne contient pas les noms des personnes assassinées ou disparues et parce qu'il est situé à proximité d'une base militaire.

Lors d'un parcours du lieu avec l'AFP, l'architecte Julio Gaeta avait expliqué que les panneaux d'acier de l'ensemble avaient été édifiés de manière à «être préparés à recevoir les noms et les légendes que les gens voudront».

Sicilia relève que la violence au Mexique continue de faire des centaines de victimes chaque mois et, avec d'autres mouvements sociaux, il a souligné que le déploiement de l'armée contre le crime organisé à partir de 2006 avait provoqué une forte hausse du nombre de victimes. Les autorités estiment qu'entre 2006 et 2012, période de la présidence de Felipe Calderon, on a compté plus de 70 000 morts et 26.000 disparus.

«Nous ne voulons pas de mémorial, nous voulons la justice», a dit pour sa part à l'AFP, avant l'inauguration, José Antonio Robledo, qui mène une lutte incessante pour retrouver son fils, disparu en 2009 au nord du Mexique.

Pour Javier Sicilia, un mémorial ne peut être «qu'un point d'arrivée et cela n'est pas possible sans un sauvetage de la mémoire». «Nous ne savons même pas combien il y a de morts», a regretté le poète qui a parcouru avec de longues caravanes le Mexique et les États-Unis pour réclamer justice et la fin de la lutte militaire contre les narcotrafiquants.

Le mémorial a coûté 1,8 million d'euros, puisés dans l'argent saisi aux organisations criminelles. Il est situé non loin du siège de la présidence mexicaine, dans un espace vert où ont été érigés des murs d'acier entourés de pins. Le président Calderon avait décidé au dernier moment de ne pas l'inaugurer avant d'abandonner la présidence le 1er décembre.

Après son arrivée au pouvoir, Enrique Peña Nieto avait engagé des discussions pour tenter de concilier les points de vue des différentes organisations de victimes autour d'un seul monument, mais, faute d'accord, il fut finalement décidé d'inaugurer l'existant, a expliqué vendredi le ministre de l'Intérieur.