«Nous ne t'oublions pas», «Nous attendrons 2014!»: des milliers de Chiliens, de Chiliennes surtout, ont rendu jeudi un émouvant hommage spontané à la «présidente chérie» Michelle Bachelet à sa sortie du palais de la Moneda, en espérant son retour dans quatre ans.

Tôt jeudi, des habitants de Santiago se sont rassemblés avec des drapeaux, banderoles et portraits à l'arrière du palais présidentiel.

La dirigeante socialiste s'y est offert un dernier bain de foule avant de se rendre au Parlement de Valparaiso pour la prise de fonctions de son successeur de droite Sebastian Pinera.

Une clameur l'a accueillie, puis ses admirateurs ont scandé: «20-14! 20-14!»

Des inconditionnels, mais aussi des Chiliens se rendant à leur travail, avaient tenu à s'arrêter.

«Elle a toutes les qualités du monde. Sens politique, sens humain, chaleur, diplomatie. En fait, elle a les qualités d'une vraie mère de famille», explique Miriam Marcos, commerçante de 47 ans, sautillant pour apercevoir le costume bleu de la présidente.

Mme Bachelet, 59 ans, quitte le pouvoir avec une popularité de 84%, malgré les critiques sur sa gestion du séisme et du tsunami du 27 février, finalement approuvée par 75% des habitants.

Ses partisans regrettent encore que la Constitution lui ait interdit de briguer un deuxième mandat consécutif, ouvrant la voie au retour au pouvoir de la droite, après 20 ans de gouvernement de centre-gauche depuis la fin de la dictature (1973-1990).

«Le problème, c'est que le meilleur candidat de la Concertacion (la coalition de centre-gauche) ne pouvait être candidat», regrette Loretta Velasquez, graphiste de 38 ans. «Mais je suis sûre qu'elle va se présenter en 2014».

«Aujourd'hui est mon dernier jour de gouvernement, ne faisons pas de politique-fiction», a répondu Mme Bachelet qui ne souhaite pas rester dans l'histoire comme «la première femme présidente».

Mais le symbole reste fort aux yeux de ses concitoyennes, «dans un pays conservateur dont la mentalité était et reste machiste», insiste Loretta.

Elle salue les mesures gouvernementales en faveur de l'enfance, des mères célibataires, des mères de famille retraitées, de l'égalité salariale homme-femme, de l'accès à la contraception.

La popularité tient aussi au fait que Mme Bachelet ne soit pas issue de l'establishment politique chilien -comme ses prédécesseurs et son successeur-, mais de la classe moyenne.

C'est aussi une mère célibataire dans un pays qui n'a légalisé le divorce qu'en 2004 et une victime de la torture sous la dictature, qui cultive la mémoire et non la revanche.

Son contact informel, spontané, sa proximité avec les Chiliens de la rue ont aussi fait d'elle la «mère de tous les Chiliens», surnom qu'elle a fini par adopter.

«Ne t'en va pas, maman!», titrait jeudi le quotidien satirique The Clinic. «Hasta la vista, baby», clamait le tabloïde Ultimas Noticias.

Après des visites quotidiennes dans les décombres de villes sinistrées par la catastrophe qui a fait 497 morts et des centaines de disparus, Mme Bachelet a affirmé cette semaine qu'elle resterait auprès des gens et reviendrait sur le terrain.