(Cincinnnati) Le président des États-Unis Donald Trump a beau dire qu’il aime les gagnants, mais les généraux sudistes dont il entend défendre la mémoire en ne retirant pas leur nom de certaines bases de l’armée étaient loin d’être tous des génies militaires.

Parmi ces 10 généraux, qui ont combattu le gouvernement américain, certains ont commis de graves erreurs pendant une bataille, d’autres ont maltraité des prisonniers nordistes. On compte parmi eux des propriétaires d’esclaves et même un membre présumé du Ku Klux Klan.

Pour défendre leur mémoire, M. Trump a dit que ces bases militaires « font partie d’un grand héritage américain, une histoire de vainqueurs, de victoires et de liberté ».

Cependant, il existe un soutien croissant, même dans un Sénat dominé par les républicains, pour retirer le nom de généraux confédérés. D’anciens commandants ont condamné ces hommages. Selon le général à la retraite David Petraeus, on a honoré des hommes qui « ont pris les armes contre les États-Unis, et pour le droit d’asservir d’autres [Américains]. »

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David Petraeus

Vénéré depuis longtemps dans une grande partie des États du Sud, Robert E. Lee, qui fut le général en chef de l’armée rebelle, est dans la mire de ceux qui s’opposent qu’on salue la mémoire des confédérés. La guerre civile a tué des centaines de milliers d’Américains au cours de batailles figurant parmi les plus sanglantes de l’histoire.

Donald Trump a déjà décrit Robert Lee comme « un grand général » lors d’une leçon impromptue d’histoire de la Guerre de Sécession en 2018. Il avait alors affirmé que le président de l’époque Abraham Lincoln avait « une phobie » sur le général sudiste, jusqu’à ce que celui-ci soit finalement vaincu par Ulysses S. Grant.

Si les premières victoires du général Lee ont placé l’armée de l’Union sur la défensive, sa défaite décisive à Gettysburg, en 1863, marquée par la désastreuse charge du général Pickett, est devenue l’un des tournants de la guerre.

Si Robert Lee a été décrit dans le Sud comme un héros gentilhomme, c’était avant tout un esclavagiste. Un de ses anciens esclaves a déjà témoigné qu’il l’avait fait fouetter brutalement.

Le général Braxton Bragg, qui a donné son nom à célèbre base de l’armée en Caroline du Nord, était également un esclavagiste. Il était un officier impopulaire qui a démissionné de son commandement après sa défaite en 1863 à Chattanooga.

Le général John Bell Hood, dont une base porte le nom au Texas, et ses subordonnés ont laissé filer des soldats nordistes après de rudes combats à Spring Hill. Il s’ensuivit une cuisante défaite à Franklin. Selon le défunt historien Shelby Foote, le général Hood a détruit son armée de fond en comble.

Bourreaux et KKK

Une base en Virginie doit son nom au général A. P. Hill. Celui-ci a été tué au combat en 1865, mais il doit sa renommée au comportement de ses troupes après la bataille du Cratère, l’année précédente. Des soldats sudistes, furieux de la présence de soldats noirs au sein de l’armée de l’Union, en ont exécuté un certain nombre, selon des lettres écrites par des militaires. Des historiens racontent que le général avait ordonné à des prisonniers blancs de marcher aux côtés de leurs collègues noirs afin d’entendre les injures racistes de la population de Petersburg,

George Pickett, dont la désastreuse attaque avait couronné la défaite de Gettysburg, a fait exécuter 22 soldats de l’Union. Il a ensuite fui au Canada. Une base porte son nom en Virginie. Le général John Brown Gordon, reconnu pour son efficacité, est même devenu sénateur et gouverneur de la Géorgie plusieurs années après la guerre. On l’a soupçonné d’être un des chefs du Ku Klux Klan. Lui aussi a été honoré.

Pour certains intellectuels du Sud, comme l’historien Ted Ownby, les conséquences d’un changement de nom sur le plan politique ne sont pas nettes. Selon M. Ownby, certains pourraient bien sûr s’en offusquer, mais il soutient que la population actuelle est moins fascinée et s’identifie moins avec les dirigeants confédérés que les générations précédentes.

« Le Sud et les sudistes sont devenus beaucoup plus. Être du Sud ne signifie plus que l’on ait enraciné dans le soutien ou le respect de la Confédération », dit le professeur de l’Université du Mississippi.