«Ce que l'establishment républicain et la Chambre de commerce ne comprennent pas c'est qu'il y a une large part de l'Amérique qui veut une bataille. Si vous êtes un conservateur, vous pensez que Barack Obama est littéralement en train de détruire le pays que vous aimez. Et vous voyez que votre leadership (au Congrès) ne semble pas disposé à se mesurer à lui et capable de prendre le dessus sur lui.»

Newt Gingrich, ancien président de la Chambre des représentants, a fait cette analyse de la défaite surprise d'Eric Cantor, numéro deux de la Chambre, face David Brat lors d'une élection primaire en Virginie mardi. Il exagérait sans doute, comme il en a l'habitude. Après tout seulement 10% de l'électorat de la 7e circonscription de Virginie ont voté. Et plusieurs des électeurs ont voulu exprimer leur simple et sincère rejet d'un élu qui avait oublié selon eux ses racines, obnubilé qu'il était par les jeux de pouvoir de Washington et ses ambitions nationales.

Mais la perception en politique est parfois plus importante que la réalité. Et l'opinion de Gingrich est largement répandue aujourd'hui dans les médias et chez les politiciens. D'où la satisfaction que doit ressentir aujourd'hui le sénateur républicain du Texas Ted Cruz et ses semblables.

S'il faut se fier à des analystes comme Gingrich, Eric Cantor a perdu parce qu'il n'était pas suffisamment opposé à Barack Obama. La chose fait sourire quand l'on sait que le lieutenant de John Boehner a notamment empêché ce dernier de conclure une grande entente à l'été 2011 qui aurait mis fin aux bras de fer perpétuels entre la Maison-Blanche et le Congrès sur les questions budgétaires.

Mais la leçon que plusieurs républicains du Congrès retiendront est celle-ci : à moins d'être aussi intrasigeants qu'un Ted Cruz, ils risquent d'être évincés dans une primaire par un adversaire soutenu par les militants du Tea Party et leurs compagnons de route au sein du Parti républicain.

Cette leçon aura notamment pour effet de marginaliser tous les républicains qui ont milité ou qui militent en faveur d'une réforme de l'immigration. Ce groupe inclut des candidats présidentiels potentiels, dont Jeb Bush, Marco Rubio et même Rand Paul qui a déploré hier le fait que son parti se soit piégé en qualifiant d'«amnistie» tout changement en matière de loi migratoire. Comme d'autres, ces trois-là savent que le Parti républicain doit se réconcilier avec l'électorat latino pour espérer retourner à la Maison-Blanche en 2016.

Ted Cruz serait évidemment le candidat du refus total de tout compromis avec Barack Obama et les démocrates. Et ses chances de remporter l'investiture républicaine en 2016 sont à la hausse depuis mardi.