Donald Trump a défendu ce matin sur Twitter son droit de partager avec le ministre des Affaires étrangères russe et l'ambassadeur de Russie à Washington des «faits concernant le terrorisme et la sécurité aérienne». Il a même invoqué des «raisons humanitaires» pour justifier ses confidences.

Contrairement au conseiller à la sécurité nationale H.R. McMaster et au secrétaire d'État Rex Tillerson, le président n'a pas démenti l'exclusivité du Washington Post selon laquelle il a révélé aux Russes des informations hautement classifiées concernant un projet d'attentat mijoté par le groupe État islamique en Syrie. Il n'a pas non plus fait référence aux graves inquiétudes soulevées par ses confidences.

Selon le New York Times, qui a vite confirmé l'exclusivité du Post, le partenaire ayant obtenu les informations hautement classifiées avait menacé de ne plus offrir de renseignements aux États-Unis si ces infos étaient partagées trop largement.

Selon le Times et le Post, le président a en outre mis en danger la source des États-Unis en Syrie en mentionnant aux Russes la ville où les informations ont été obtenues.

C'est le compte-rendu des échanges entre Trump et ses invités russes qui a alarmé certains membres de l'administration Trump, qui ont aussitôt averti la CIA et la NSA. Dans un gazouillis publié ce matin, le président s'est de nouveau plaint des fuites émanant des renseignements américains.

Donald Trump n'a pas enfreint la loi en divulguant aux Russes des informations hautement classifiées. En tant que président, il peut le faire. Mais ses confidences aux représentants d'une puissance étrangère dont les objectifs en Syrie et dans le monde divergent de ceux des États-Unis mettent en cause son jugement, sa fiabilité et sa maturité (le Post et le Times indiquent qu'il a dévié du scénario prévu pour se vanter de la qualité des informations qu'il reçoit).

Les alliés des États-Unis, dont l'Arabie saoudite et Israël, qu'il rencontrera bientôt lors de son premier voyage à l'étranger, voudront-ils désormais partager avec lui leurs secrets les plus précieux? Les médias israéliens rapportent déjà que les renseignements américains ont contacté leurs collègues israéliens pour les exhorter à la prudence avec Trump.

Hier soir, des sénateurs républicains se sont dits troublés par les révélations du Washington Post et des autres médias. Donald Trump lui-même aurait sans doute été scandalisé si Hillary Clinton avait été aussi négligente dans sa façon de traiter des informations classifiées. C'est du moins ce qu'on pourrait croire en se rappelant ses attaques incessantes sur le sujet contre l'ancienne secrétaire d'État lors de la campagne présidentielle (voir la vidéo qui coiffe ce billet).

On se souvient aussi que Paul Ryan, président de la Chambre des représentants, avait réclamé que le directeur du Renseignement national mette fin à ses breffages d'Hillary Clinton en raison de l'affaire des courriels. Adoptera-t-il vis-à-vis du président une politique de deux poids deux mesures?