Le nouveau président croate, le juriste social-démocrate Ivo Josipovic, a la «mission historique» de faire entrer le pays dans l'UE et d'enrayer la corruption qui ronge l'administration de cette jeune république, indépendante depuis 1991, estimaient lundi les analystes.

«La mission historique d'Ivo Josipovic est claire: conduire la Croatie dans l'Union européenne», a fait valoir l'analyste politique, Branko Mijic. «Un pays né pendant une guerre va finalement devoir se transformer en un pays de la paix, un pays civilisé au sein de l'Europe», a-t-il ajouté en faisant référence à la guerre d'indépendance (1991-1995).

Pour Radovan Vukadinovic, professeur de relations internationales à l'Université de Zagreb, «l'élection de M. Josipovic est sans doute un pas important dans le renforcement des relations entre Zagreb et Bruxelles».

«Josipovic va également essayer de transformer la Croatie en un exemple à suivre pour les pays de la région aspirant à intégrer l'UE», a noté M. Vukadinovic.

Âgé de 52 ans, M. Josipovic a été élu dimanche au second tour de l'élection présidentielle avec 60,29% de voix face au maire de Zagreb, Milan Bandic, selon les résultats officiels.

Il s'est engagé notamment à ce que la Croatie intègre l'UE avant 2012, à relancer l'économie frappée par une grave récession et à combattre fermement la corruption qui ronge la haute administration et des entreprises d'État.

Le quotidien indépendant Novi List qualifiait lundi la victoire de M. Josipovic de «référendum» dans lequel les électeurs ont soutenu «un homme qui les a convaincus qu'il était capable de faire ce qu'aucun des présidents et gouvernements précédents n'avait pu accomplir: enrayer la corruption et le crime organisé».

L'analyste politique Davor Butkovic estime que l'élection de cet expert en droit pénal international, absent de la vie politique dans les années 1990 - période de transition vers une économie du marché pendant laquelle le processus des privatisations a été entaché par de nombreuses affaires de corruption -, signifie que les Croates ont voulu pour président «un nouveau type de politicien».

«Alors que les années 1990 symbolisent aussi la corruption, le programme «Justice pour la Croatie» de M. Josipovic représente un avenir meilleur pour le pays», a-t-il poursuivi.

Le nouveau président hérite d'un pays en proie à une crise économique où le chômage frappe 16,1% de la population active et où la dette extérieure représente 94% du PIB.

Si M. Josipovic a promis de redresser la situation, ses pouvoirs sont limités dans ce domaine, dont la gestion revient au gouvernement conservateur du premier ministre, Jadranka Kosor.

Les deux se sont néanmoins engagés à cohabiter d'une manière souple pendant les deux années à venir, des élections législatives étant prévues fin 2011.

M. Josipovic succède au centriste Stipe Mesic, 75 ans. Ce dernier a notamment le mérite d'avoir, pendant ses deux mandats constitutionnels de cinq ans, sorti le pays de l'isolement international dans lequel l'avait plongé le régime du premier chef de l'État, l'autocratique Franjo Tudjman.

M. Mesic a oeuvré pour modifier la Constitution afin de limiter les pouvoirs présidentiels et transformer la Croatie en une «république parlementaire». Durant ses mandats, le pays a intégré l'OTAN en 2009 et s'est considérablement rapproché de l'UE.

La cérémonie de passation des pouvoirs entre MM. Mesic et Josipovic est prévue pour le 18 février.