La très controversée prison de Guantanamo, ouverte après les attentats du 11 septembre 2001, pourrait ne plus être bientôt qu'un lointain souvenir, les deux principaux candidats à la présidentielle américaine Barack Obama et John McCain s'étant prononcés pour sa fermeture. Reste à déterminer le sort des quelque 270 détenus encore sur place.

Les jours du camp de détention militaire, installé sur une base navale américaine à Cuba et considéré comme une «zone grise» du droit international par ses détracteurs, semblent comptés.

Le principal argument avancé par l'administration Bush pour détenir sans jugement les suspects de terrorisme s'est effondré lorsque la Cour suprême des États-Unis a estimé le 12 juin qu'ils devaient bénéficier de certains droits juridiques. Et les deux principaux prétendants à la Maison Blanche préconisent la fermeture de la prison.

«Il est assez facile de dire, 'on va fermer Guantanamo», a souligné le contre-amiral Mark Buzby avant de quitter la tête du centre de détention le mois dernier. «Mais le fait est qu'il y a des personnes très dangereuses qui doivent être gardées quelque part.»

John McCain veut transférer les détenus de Guantanamo à la prison militaire de Fort Leavenworth, au Kansas. Mais un problème de place pourrait se poser alors que ce centre, conçu pour 515 prisonniers, en accueille déjà plus de 400. Le candidat républicain souhaite que les détenus soient jugés par des commissions militaires, ces juridictions d'exception autorisées en vertu d'une loi de 2006 qu'il a soutenue.

Barack Obama veut de son côté transférer les détenus dans des prisons civiles et militaires aux Etats-Unis, selon son porte-parole Reid Cherlin. Et qu'ils soient jugés devant des tribunaux pénaux civils ou des cours martiales militaires.

Le Pentagone compte faire juger quelque 80 détenus par des commissions militaires, mais 130 autres, bien que n'étant pas poursuivis, sont considérés comme trop dangereux pour être remis en liberté. En outre, une soixantaine dont le transfert est programmé ne peuvent rentrer chez eux, pour différentes raisons, toujours selon le Pentagone: soit leur pays refuse de les accueillir, soit il pourrait les libérer ce qui créerait ainsi un risque pour la sécurité des États-Unis, soit ils risqueraient d'y être torturés.

Le secrétaire américain à la Défense a récemment déclaré vouloir la fermeture de la prison de Guantanamo, mais a ajouté: «Nous sommes coincés à plusieurs égards.»

La récente décision de la Cour suprême permet à tous les détenus de demander à des juges fédéraux leur libération immédiate. Les responsables de la base navale de 117 kilomètres carrés située à l'extrémité orientale de l'île de Cuba se disent prêts à transférer les détenus si on leur en donne l'ordre.

Si Washington décide de transférer les procès pour crimes de guerre aux Etats-Unis, le complexe judiciaire construit à Guantanamo pourrait être déménagé jusqu'au lieu choisi. Le commandant de l'armée de l'air Gail Crawford, du Bureau des commissions militaires, précise que rien n'oblige sur le plan légal à ce que les procès se déroulent à Guantanamo.

Un seul suspect a été transféré à la prison en 2007, contre près de 800 les années précédentes: le commandant de la marine Jerrey Gordon, porte-parole du Pentagone, évoque des «efforts concertés pour réduire la population à Guantanamo».

Des avocats de détenus réclament la fermeture de la prison et affirment que les procès pour crimes de guerre sont injustes car ils autorisent les éléments obtenus lors d'interrogatoires musclés, peut-être même au moyen de simulacres de noyade (waterboarding), et par ouï-dire. Ils affirment que parmi les prisonniers figurent des innocents qui se trouvaient au mauvais endroit au mauvais moment, et ont été vendus aux forces américaines.

L'ancien président américain Jimmy Carter, détracteur de la prison de Guantanamo, estime qu'après avoir été vidée, l'installation devrait peut-être être fermée pour toujours, ou transformée en un musée où les gens peuvent étudier l'importance de respecter des conventions de Genève (sur le traitement des prisonniers de guerre, ndlr) et d'autres traités sur les droits de l'homme».