Sexy inc. nos enfants sous influence, le dernier documentaire de Sophie Bissonnette, questionne la société québécoise sur ce qui semble être une norme: l'utilisation du sexe, à toutes les sauces, pour appâter le consommateur qui sommeille en nous. La réalisatrice explore l'hypersexualisation de l'espace public.

Premières victimes du mouvement: les enfants. Sophie Bissonnette espère faire prendre conscience de ce nouveau phénomène aux adultes en général, aux parents en particulier.

Q Comment est née l'envie de faire un documentaire sur l'hypersexualisation?

R J'ai été approchée il y a trois ans pour le Y des femmes, qui travaille beaucoup avec les jeunes filles et les fillettes. À travers les animatrices, elles commençaient à voir cette problématique se développer, et qu'elle influençait beaucoup les filles dans leur perception d'elles-mêmes, leur estime de soi, le rapport amoureux. Je devais participer à un comité chargé de réfléchir là-dessus. Ils m'ont demandé de faire un film personnel.

Q Qu'est-ce que l'hypersexualisation?

R Il y a deux phénomènes dans notre environnement. Il y a un bombardement de nos espaces à la fois publics et privés d'images très sexuées. Il ne s'agit pas d'une représentation de la sexualité, mais on sexualise des choses qui ne le sont pas normalement. On sexualise des enfants, on sexualise des habits, on sexualise des poupées ou toutes sortes de produits. C'est très dérangeant, surtout pour une femme comme moi qui a 50 ans, et qui a vécu toutes les luttes dans les 30 dernières années. On sexualise en utilisant les stéréotypes les plus éculés: tout est axé sur l'apparence et le corps, pour les filles, et pour les garçons, tout est sur leurs performances sexuelles. C'est une sexualité très génitale.

Q S'agit-il d'un phénomène récent? Peut-on voir déjà les conséquences?

R Les recherches démontrent scientifiquement que ça a des effets importants sur les filles, notamment pour les troubles alimentaires et la dépression. Les jeunes sont exposés de façon tellement précoce à ces images et à la pornographie. Ils en regardent très jeunes, et bien sûr sans aucun encadrement adulte.

Q Que faut-il faire pour endiguer le phénomène?

R C'est d'abord individuellement que l'on peut réagir. Il faut développer l'esprit critique de nos jeunes. Il faut qu'ils prennent conscience du phénomène. Ensuite, des solutions doivent être collectivement prises, et ça, ça concerne les médias, les émissions, les journaux et les clips. Il faut réfléchir à assainir l'environnement pour protéger nos enfants des stéréotypes qu'on nous balance.

Q Par qui le film sera-t-il vu?

R L'idée du film est de créer un dialogue pour qu'on puisse réagir au phénomène. On peut aussi décider de ne pas acheter les produits qui utilisent ces images. Cette question est une sorte de boîte de Pandore parce qu'elle pose beaucoup de questions sur les valeurs de notre société et le rôle des adultes. Il faut que l'on réoccupe l'espace intime de nos enfants.

Sexy inc. nos enfants sous influence, au cinéma ONF, à 19h, du 15 au 19 octobre à Montréal. En anglais le 24 octobre.