(Londres) Des règles post-Brexit plus souples pour la finance britannique pourraient conduire à un nivellement par le bas des normes encadrant le secteur, ont prévenu lundi dans une lettre ouverte près de 60 personnalités, essentiellement des universitaires.

Les auteurs de la lettre font part de leurs « inquiétudes » concernant les plans du gouvernement pour « favoriser la compétitivité après le Brexit » de la City, des réformes qui pourraient certes conduire à des services moins chers et de qualité, mais risqueraient aussi de déclencher de sérieux effets délétères.

Parmi les signataires de la lettre adressée notamment au ministre britannique des Finances Rishi Sunak figurent le prix Nobel d’économie américain Joseph Stiglitz, l’ancien chef de file libéral-démocrate britannique Vince Cable ou encore l’ex-ministre grec des Finances Yanis Varoufakis.

Le gouvernement britannique travaille à une réforme de sa réglementation financière, mettant en avant le souhait d’un secteur financier « agile », mais qui garderait une réglementation « respectée internationalement ».

L’exécutif a précisé la semaine dernière que cette nouvelle législation devrait « maintenir et renforcer la position du Royaume-Uni en tant que leader mondial des services financiers après avoir quitté l’UE », insistant sur la croissance et la compétitivité internationale.

Dans ce cadre, Londres avait lancé le mois dernier une réforme de la réglementation des assurances, qui prévoit notamment d’assouplir les exigences en ce qui concerne les fonds propres des entreprises du secteur.

« Nous voulons nous assurer que le secteur des services financiers est à la hauteur des entreprises et consommateurs du Royaume-Uni, tout en consolidant notre position de leader mondial et en encourageant des normes internationales élevées », a fait valoir un porte-parole du ministère des Finances lundi soir.

« Maintenant que nous avons quitté l’UE, il est juste que les objectifs des régulateurs (du secteur) reflètent le rôle essentiel des services financiers pour soutenir l’économie, et fassent du Royaume-Uni un endroit encore plus attrayant pour investir et faire des affaires », a-t-il ajouté.

Les auteurs de la lettre s’inquiètent de la possible tentation d’assouplir les règles de lutte contre le blanchiment d’argent pour attirer les ultra-riches du monde entier, ou encore du risque de commencer une course au moins-disant avec d’autres pays, susceptible de tirer tout le monde vers le bas.

L’assouplissement des règles pourrait aussi conduire les entreprises à prendre des risques et à se décharger ensuite sur le contribuable en cas d’échec, comme lors de la crise financière de 2007-2008.

« Après la dernière crise financière mondiale, qui a coûté à l’économie planétaire quelque 10 000 milliards de dollars, il a été admis que l’accent mis sur la compétitivité par l’Autorité des services financiers de l’époque avait contribué à la catastrophe », selon les auteurs de la lettre.

L’accent mis sur le secteur financier, concentré dans la capitale britannique, pourrait aussi nuire aux régions du Royaume-Uni où celui-ci est sous-représenté et un trop fort soutien pourrait en outre être contre-productif et pénaliser la croissance britannique, estiment-ils.