Le secteur bancaire canadien s'apprête à boucler en force une année d'exception en Bourse. Quelle part de la hausse faut-il attribuer à Donald Trump ?

Que vient-il de se passer ?

Depuis la victoire de Donald Trump aux élections du 8 novembre, l'appréciation des titres des grands prêteurs canadiens s'est accentuée de manière notable. L'accélération semble avoir été soutenue à la fin de novembre par les nominations du prochain président des États-Unis de l'ancien de Goldman Sachs, Steve Mnuchin, au poste de secrétaire américain au Trésor, et du financier Wilbur Ross, au Commerce. Steve Mnuchin est notamment favorable à une réduction des impôts sur les bénéfices, à une révision de la réforme financière Dodd-Frank et à l'élimination de la règle Volcker qui encadre les investissements spéculatifs.

Pourquoi les marchés réagissent-ils ainsi ?

« Les règles à respecter se sont intensifiées depuis la crise financière. À quel point elles seront renversées, on ne le sait pas. Mais on s'attend à ce que ça devienne moins sévère pour les banques », dit l'analyste Gabriel Dechaine, chez Canaccord, en entrevue à La Presse. « Un exemple serait l'annulation de la règle Volcker qui restreint la négociation pour compte propre des banques. La Royale, notamment, a cessé ce type d'activités aux États-Unis, et si jamais la règle était supprimée, c'est possible que la Royale reprenne ce type d'activités. L'impact de l'ensemble des règles imposées depuis la crise s'est avéré négatif sur la rentabilité des banques aux États-Unis au cours des cinq ou six dernières années. »

Des assouplissements sont-ils une bonne chose ?

« La perspective que la nouvelle administration relâche quelque peu le niveau de réglementation des grandes banques et du système financier américain est très favorable. Je ne préconise pas un retour aux pratiques de "cowboy" des années de laissez-faire financier, mais il me semble qu'il serait bien que le pendule revienne quelque peu de l'extrême réglementaire que subit le secteur bancaire depuis quelques années. Une banque frileuse ne contribue pas beaucoup à la vitalité de l'économie », souligne le gestionnaire de portefeuille Philippe Le Blanc, de la firme Cote 100, dans sa lettre financière de décembre.

Quelles sont les banques canadiennes les plus exposées aux États-Unis ?

La Banque TD a un réseau de 1300 succursales aux États-Unis et a bonifié ses activités américaines cet automne avec l'acquisition de Scottrade. La présence américaine de la Banque de Montréal est notamment assurée par les acquisitions passées de Harris Bank, dans les années 80, et de Marshall & IIsley, il y a cinq ans. La Banque Royale, qui a vendu ses activités de détail américaines à PNC Financial Services il y a quatre ans, a réalisé l'an passé une transaction de taille aux États-Unis en achetant City National pour plus de 5 milliards US. Cet été, la CIBC a annoncé l'achat de PrivateBancorp, banque de Chicago, pour 4 milliards US. La réunion d'actionnaires visant à approuver cette transaction vient toutefois d'être reportée, une décision qui laisse croire que les appuis sont insuffisants dans le contexte haussier actuel du secteur. « La CIBC devra payer plus cher pour acquérir PrivateBancorp. La question est de savoir combien », dit Peter Routledge, de la Banque Nationale, dans une note envoyée à ses clients.

Qu'en est-il des taux ?

L'économie américaine se porte mieux, et depuis la fin de l'été, le marché a commencé à anticiper des pressions inflationnistes. Le marché semble également croire que les intentions de Donald Trump se traduiront par une politique budgétaire expansionniste qui nourrira l'inflation. Or, lorsque l'inflation se fait sentir, les taux d'intérêt sont appelés à augmenter. L'ascension des taux obligataires est une bonne nouvelle pour les assureurs qui investissent l'argent provenant des primes récoltées auprès des clients dans des titres à revenu fixe, mais aussi pour les banques, qui sont appelées à enregistrer des revenus plus élevés.