Le duel tant attendu entre les deux grands espoirs du tennis canadien Denis Shapovalov et Félix Auger-Aliassime a connu une issue dramatique, lundi à New York, quand le second a été forcé à l'abandon alors qu'il était mené 5-7, 7-5 et 4-1.

Les deux joueurs s'étaient échangé les deux premières manches et Shapovalov menait 2-0 au début de la troisième quand Auger-Aliassime, visiblement mal en point physiquement, a demandé une pause. Allongé sur le court, les pieds sur sa chaise, il a vite été rejoint par deux thérapeutes qui ont surveillé ses signes vitaux.

Victime par le passé de problèmes de tachycardie, Auger-Aliassime a expliqué que son coeur battait à un rythme irrégulier, et il s'est aussi plaint d'étourdissements. Même si le soleil venait de se coucher, le degré d'humidité était encore très élevé au Centre national de tennis Billie Jean King, et plusieurs joueurs ont dû recevoir des traitements.

Au bout du temps réglementaire, le Québécois a quand même réussi à reprendre le jeu, mais il n'était plus que l'ombre de lui-même et s'est finalement résigné à l'abandon après que Shapovalov eut porté son avantage à 4-1.

Cruellement déçu d'être ainsi empêché d'aller au bout du premier match de sa carrière en Grand Chelem, le joueur de 18 ans a éclaté en sanglots, le visage caché par une serviette. Vite rejoint par son adversaire, qui l'a aidé à retourner à sa chaise et est resté un long moment à ses côtés, Auger-Aliassime s'est excusé en expliquant qu'il ne se sentait vraiment pas bien.

«J'espérais que ça reviendrait et que je pourrais mieux me défendre en quatrième manche, mais je vois que ce n'est pas possible», l'a-t-on entendu dire, avant que Shapovalov tente de le rassurer en lui rappelant que ce n'était que le premier d'une longue série de matchs importants entre eux.

Quelques instants plus tard, le vainqueur a expliqué: «C'est une situation médicale sur laquelle il [Auger-Aliassime] travaille depuis quelque temps et je suis certain qu'il trouvera bientôt une solution. Ce n'est pas de cette façon que nous voulions que ce match se déroule, mais je suis certain que nous aurons à nous affronter encore souvent ici et en Grand Chelem, en finale même un jour!»

Nervosité

Il y a 16 mois d'écart entre Shapovalov (19 ans) et Auger-Aliassime (18 ans), une saison d'expérience en Grand Chelem aussi, et lundi, dans ce qui était le premier match du second à ce niveau, la pression a fait une grosse différence.

Le Québécois avait pourtant bien amorcé le match, et c'est Shapovalov qui paraissait le plus nerveux. En avance 4-1, puis 5-2, Auger-Aliassime s'est toutefois mis à rater plusieurs coups et il a vu son adversaire combler l'écart et prendre la première manche.

En deuxième manche, c'est Shapovalov qui a vite creusé l'écart, mais Auger-Aliassime a réussi à son tour un superbe retour pour créer l'égalité après deux heures de jeu.

On croyait alors que tout était encore à jouer, que les deux joueurs, un peu libérés de leur nervosité, allaient enfin se livrer à fond, mais c'est alors que le destin a décidé de nous rappeler que les athlètes restent toujours des êtres humains, qu'un superhéros de 18 ans n'est quand même qu'un grand ado dont il faut surveiller la croissance, qu'un match de tennis n'est jamais la fin du monde.

Shapovalov, qui avait atteint le quatrième tour l'an dernier, affrontera au deuxième tour l'Italien Andrea Seppi (51e), ancien joueur du top 20 qui a disposé lundi de l'Américain Sam Querrey, 6-7 (6), 6-4, 6-2 et 2-1 (ret.). Le Canadien, qui a commis pas moins de 48 fautes directes lundi, devrait avoir plus de facilité à retrouver la maîtrise de ses émotions.