Le premier ministre français a opposé vendredi un «non ferme et tranquille» aux manifestants, qui avaient défilé massivement la veille pour réclamer une refonte de la réforme des retraites, alors que les syndicats ont appelé à de nouvelles manifestations en octobre.

«Non, avec le président de la République nous ne retirerons pas ce projet de réforme parce qu'il est nécessaire et raisonnable», a déclaré François Fillon, refusant de revenir sur le report de l'âge légal de 60 à 62 ans, coeur de cette réforme clé de la fin du mandat de Nicolas Sarkozy.

«Nous ne renoncerons pas à l'augmentation de la durée d'activité, parce que si par malheur nous le faisions, alors nos régimes de retraites s'écrouleraient sous le poids des déficits», a-t-il affirmé devant des parlementaires et des membres de son gouvernement.

François Fillon a revendiqué un «non ferme et tranquille» opposé «sans aucun mépris» aux manifestants, soutenus par l'opposition de gauche.

Dans l'après-midi, le ministre du Travail Eric Woerth -qui porte le projet gouvernemental en dépit de sa mise en cause dans une complexe affaire politico-fiscale mêlant conflit d'intérêts et soupçon de financement politique illégal- a enfoncé le clou, affirmant que la réforme serait «votée et appliquée», ne voyant dans la poursuite des manifestations que l'expression d'une «tradition française».

C'est un «''non'' arrogant et méprisant», a réagi l'opposition socialiste, estimant que «le gouvernement s'enferme dans une stratégie de passage en force, refusant tout dialogue».

«La réponse du gouvernement, qui se positionne contre toute réalité, cette négation de ce qui s'est passé hier, va lui revenir comme un boomerang, moi je fais ce pronostic», a réagi Bernard Thibault, le secrétaire général de la CGT, un des deux principaux syndicats, opposant à son tour un «non ferme et résolu» au gouvernement.

En fin de matinée, les principales centrales syndicales françaises ont appelé à des rassemblements dans tout le pays le samedi 2 octobre, tour de chauffe avant une «nouvelle journée massive» de grève et de manifestations le 12 octobre.

Ils estiment encore possible de faire reculer le gouvernement, alors que le projet de loi, déjà voté par l'Assemblée nationale, doit être examiné à partir du 5 octobre au Sénat.

À plusieurs reprises, Nicolas Sarkozy a dit sa détermination à mener au bout son impopulaire réforme des retraites, présentée comme le chantier emblématique de la fin de son mandat. Après une série de scandales, il compte sur cette réforme pour se relancer avant la présidentielle de 2012.

Jeudi, entre près d'un million de personnes selon la police et 2,9 à 3 millions selon les deux principales centrales ont défilé contre le projet.

Les syndicats ont estimé avoir atteint leur objectif, qui était de faire aussi bien ou mieux que pendant la précédente journée d'action, le 7 septembre (un million de manifestants selon la police, 2,7 millions selon les syndicats).

Au contraire, s'appuyant sur le taux moins élevé de grévistes dans la fonction publique, l'exécutif a dit constater une «décélération».

Le gouvernement considère que faire travailler les Français plus longtemps, à l'instar de leurs voisins européens, est la meilleure option pour répondre à des besoins de financement évalués à 70 milliards d'euros d'ici à 2030.

Le président Sarkozy, qui avait déjà concédé quelques aménagements après les manifestations du 7 septembre, pourrait à nouveau faire un geste, sans doute en faveur des handicapés et des femmes. Toutefois, ces «améliorations» resteront dans «le cadre de l'équilibre global» de la réforme, a prévenu vendredi le chef de file des sénateurs de la majorité, Gérard Longuet.