Les Roumains pleuraient lundi les «héros» du soulèvement anticommuniste de décembre 1989, alors que le président Traian Basescu, réélu pour un second mandat, a prêté serment devant le Parlement en rendant hommage «au millier de jeunes qui ont donné leur vie pour la liberté».

Dans l'après-midi, environ 300 personnes, en majorité des jeunes, se sont rendues sur les lieux les plus emblématiques du soulèvement à Bucarest, notamment place de l'Université, a constaté une journaliste de l'AFP. «Liberté», «honneur aux héros», ont-ils scandé en portant pour certains des banderoles où étaient inscrits les noms des personnes tuées lors de la révolte.

Après Timisoara (ouest), première ville «martyre» de Roumanie, les protestations contre le dictateur Nicolae Ceausescu s'étaient étendues à Bucarest le 21 décembre.

«Il y a 20 ans, les Roumains ont vaincu la peur omniprésente et se sont révoltés contre le régime communiste», a rappelé l'Association 21 décembre, qui regroupe les «révolutionnaires» ayant participé à ces événements.

«Le 21 décembre et la nuit qui suivit, des dizaines de Bucarestois avaient été tués, des milliers blessés, arrêtés ou torturés pour avoir eu le courage de demander Liberté et Démocratie», a ajouté l'association.

Au total 48 personnes sont mortes à Bucarest dans la nuit du 21 décembre, lorsque l'armée et la Securitate, la redoutable police politique, ouvrirent le feu.

Dans l'ensemble du pays, la Révolution a fait 1 104 morts, dont 162 avant la fuite de Nicolae Ceausescu et de son épouse Elena, le 22 décembre, et 942 après, victimes de mystérieux «terroristes» selon certains, de la confusion régnant au sein de l'armée et des civils, dont beaucoup avaient reçu des armes, selon d'autres.

«Vingt ans après, notre sentiment est que les autorités ont tout fait pour étouffer la vérité», a déclaré à l'AFP le président de l'association, Teodor Maries.

«Ce que nous demandons c'est que ceux ayant ordonné la répression soient jugés, on n'a jamais demandé qu'ils soient mis à mort», a-t-il ajouté.

À part le couple Ceausescu, sommairement jugés et exécutés le 25 décembre, peu d'anciens responsables communistes ont été condamnés.

«En décembre 1989 nous avions de hauts idéaux, nous luttions pour la liberté et la démocratie et rêvions d'une société sans corruption, où la justice fasse son devoir», a déclaré M. Maries, évoquant la «déception» de nombre de Roumains.

Basescu prête serment

Le président Basescu, réélu pour un second mandat le 6 décembre, a prêté serment devant le Parlement lundi et rendu hommage aux manifestants qui ont perdu la vie.

«Leur sacrifice représente la clé de voûte des institutions démocratiques d'aujourd'hui», a-t-il affirmé tout en regrettant que «la société roumaine pense que toute la vérité n'a pas été dite sur ces événements et que les coupables n'ont pas été punis».

«Nous espérons que M. Basescu continuera ce qu'il a commencé en 2006, lorsqu'il a formellement condamné devant le Parlement les crimes du régime communiste», a indiqué M. Maries.

Selon lui, une loi sur la «décommunisation», empêchant les anciens membres de la nomenklatura communiste d'occuper des postes importants dans les administrations, «serait à souhaiter».

Il a également espéré que les «criminels de décembre 1989» soient enfin déférés en justice. «Sinon, la condamnation du communisme resterait uniquement un geste symbolique».