La lutte contre l'épidémie de fièvre Ebola, la plus grave jamais enregistrée, reste une urgence de santé mondiale, a souligné jeudi l'Organisation mondiale de la santé alors que le cap des 10 000 cas est presque atteint.

Sur les 9936 cas d'Ebola enregistrés par l'OMS, un chiffre que l'organisation estime inférieur à la réalité, il y a eu 4877 décès, presque tous survenus dans trois pays d'Afrique de l'Ouest (Liberia, Sierra Leone et Guinée), selon un bilan arrêté au 19 octobre.

«La situation reste très inquiétante dans les trois pays les plus touchés», a indiqué jeudi le comité d'urgence de l'OMS, qui réunit les meilleurs experts mondiaux en matière de santé publique et d'épidémie.

L'OMS avait déclaré l'épidémie urgence sanitaire mondiale, début août.

Fin août, elle avait recensé 3052 cas et 1546 morts. Depuis, en deux mois, les chiffres ont été multipliés par 3 et il y a eu des contaminations en Espagne et aux États-Unis.

Deux autres pays d'Afrique de l'Ouest, le Sénégal et le Nigeria, également touchés, ne font plus partie de la liste officielle de l'OMS, car aucun cas n'y a été déclaré depuis 42 jours.

L'OMS a estimé jeudi que l'un de ses principaux défis était de trouver suffisamment de soignants. Ces personnels, qui ont payé un lourd tribut dans la lutte contre le virus, hésitent en effet à s'engager.

Il est «terriblement difficile de trouver assez de personnels soignants, c'est un défi majeur pour nous», a déclaré le Dr Keiji Fukuda, vice-directeur général adjoint de l'OMS,

Selon le dernier bilan de l'organisation, 443 soignants ont été infectés et 244 d'entre eux sont morts.

La Commission européenne a annoncé jeudi le déblocage de 24,4 millions d'euros (34,7 millions de dollars) «pour donner un coup de fouet» à la recherche sur l'Ebola, portant à 204,4 millions d'euros (plus de 290 millions de dollars) sa contribution financière aux efforts internationaux contre le virus.

«Nous sommes engagés dans une course contre la montre concernant Ebola, et il nous faut à la fois faire face à la situation de crise et trouver une réponse à long terme», a relevé le président de la Commission, José Manuel Barroso.

L'Union européenne devrait nommer jeudi soir un coordinateur européen de la lutte contre l'épidémie.

Sur le terrain, la situation reste tendue, notamment en Sierra Leone, où l'épidémie touche désormais l'ensemble du territoire. L'agitation a dégénéré en affrontements contre les autorités dans l'est du pays, région en quarantaine depuis août.

Deux personnes ont été tuées et une dizaine blessées dans une émeute mardi dans la ville minière de Koidu après qu'un groupe de jeunes se soit opposé à un prélèvement sanguin sur une femme considérée comme un cas suspect d'Ebola.

En Sierra Leone, l'Ebola a fait 128 morts parmi les fonctionnaires, a précisé l'OMS jeudi.

Il manque 40 % des fonds nécessaires

Au Liberia voisin, pays le plus touché, l'OMS a jugé le nombre de cas recensés sous-évalué, en particulier à Monrovia.

La décrue semblait en revanche réelle dans la province de Lofa (nord), limitrophe de la Guinée, où étaient apparus les premiers cas au Liberia en février.

Jeudi, la présidente du Liberia Ellen Johnson Sirleaf a appelé à un strict contrôle des frontières avec la Sierra Leone et la Guinée pour empêcher une résurgence du virus dans les rares régions où l'épidémie recule.

Malgré l'augmentation des moyens dans les trois pays africains les plus concernés, l'OMS souligne qu'un quart seulement des 4700 lits nécessaires dans les centres de traitement sont disponibles.

Un millier de personnels de santé

Les pays africains se sont engagés à envoyer plus d'un millier de personnels de santé pour lutter contre Ebola dans trois pays de l'ouest du continent, a annoncé jeudi à Freetown la présidente de la Commission de l'Union africaine (UA), Nkosazana Dlamini-Zuma.

«Plusieurs États membres africains se sont engagés à envoyer des personnels de santé au  Liberia, en Sierra Leone et en Guinée, y compris la RD Congo (République démocratique du Congo) qui en enverra 1000 en trois groupes», s'ajoutant à plus de 600 déjà promis par des pays de l'est du continent, a précisé Mme Dlamini-Zuma, en tournée dans les trois pays africains touchés.

Aux États-Unis, la deuxième infirmière contaminée est désormais guérie. La première infirmière contaminée est toujours hospitalisée, mais son état de santé est «désormais jugé bon», selon la clinique où elle est soignée.

En matière de transports, le Rwanda a annulé les contrôles renforcés imposés aux visiteurs en provenance d'Espagne et des États-Unis pour prévenir toute importation du virus Ebola, une mesure décidée par la ministre de la santé, désavouée par le président Paul Kagame.

L'aéroport international du Liberia a connecté ses bases de données aux listes des proches de malades, afin de leur interdire l'embarquement, même s'ils ne présentent pas de symptôme et ne sont donc pas contagieux.