Le Conseil de l'Europe a dénoncé mardi dans un rapport les lacunes et l'absence de progrès dans les enquêtes sur les violences lors du Maïdan, le mouvement de contestation proeuropéen réprimé dans le sang à Kiev qui a abouti en février 2014 à la chute de l'ex-président Viktor Ianoukovitch.

«Durant les trois mois de manifestations, il n'y a eu aucune véritable tentative de mener des enquêtes», a tout d'abord relevé le Conseil, qui a examiné les dossiers liés aux violences ayant eu lieu sur la place de l'Indépendance (Maïdan) à Kiev entre le 30 novembre 2013 et le 21 février 2014.

Après la destitution le 22 février 2014 du président Ianoukovitch par le Parlement ukrainien et l'arrivée au pouvoir d'un nouveau gouvernement pro-occidental, le Conseil a relevé un manque de coopération entre les différents services, notamment entre le ministère de l'Intérieur, le Parquet général et les services de sécurités ukrainiens.

«Dans certains cas, le service qui enquêtait relevait de la même autorité que ceux qui faisaient l'objet de l'enquête», écrit le Conseil, dénonçant dès lors un manque «d'indépendance».

«En raison de ces lacunes, il n'y a pas eu de progrès substantiels dans les enquêtes sur le Maïdan», conclut l'organisation paneuropéenne chargée de favoriser le dialogue sur la démocratie et les droits de l'homme, qui a son siège à Strasbourg.

Des ONG ont dénoncé à plusieurs reprises l'inefficacité des autorités ukrainiennes à traduire en justice les responsables des violences sur le Maïdan, notamment les auteurs du bain de sang de février 2014 lorsque près de cent manifestants avaient été tués en trois jours.

Des dizaines de manifestants, qui avaient disparu dans le village du Maïdan, l'énorme campement que les protestataires avaient installé en plein coeur de la capitale ukrainienne, n'ont de plus toujours pas été retrouvés.

Mardi matin, avant la publication du rapport du Conseil de l'Europe, le Parquet général d'Ukraine a annoncé avoir lancé un avis de recherche pour deux policiers de haut rang, accusés d'avoir organisé un assaut contre le Maïdan dans la nuit du 18 au 19 février, qui avait marqué le début de la flambée des violences de trois jours.

«D'après les résultats de l'enquête, l'ancien directeur par intérim de la police de Kiev et son adjoint (...) sont soupçonnés d'avoir organisé un assaut sur le Maïdan dans la nuit du 18 au 19 février et d'avoir donné l'ordre d'effectuer une telle opération», est-il écrit, sans plus de précisions.

Le conflit en Ukraine, plus grande «menace» depuis 1945

Le conflit en Ukraine est la plus grande menace pour la paix et la stabilité depuis la fin de Seconde Guerre mondiale, a affirmé mardi un membre du Congrès américain, en visite dans la capitale ukrainienne, appelant dès lors le président Barack Obama à fournir des armes létales à Kiev.

«Il y a de nombreuses situations graves dans le monde. Aucune d'entre elles n'est plus importante que ce qu'il se passe en Ukraine aujourd'hui», a déclaré le président de la commission de la Défense de la Chambre des représentants, William Mac Thornberry, lors d'une conférence de presse.

«C'est à bien des égards la menace la plus significative pour la paix et la stabilité depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale», a poursuivi M.Thornberry, qui a rencontré durant sa visite le président ukrainien Petro Porochenko.

La Chambre des représentants avait massivement voté la semaine dernière en faveur d'une résolution exhortant le président américain Barack Obama à fournir à l'Ukraine des armes létales pour se défendre contre l'«agression» russe.

La résolution 348-48 a été approuvée par une majorité de républicains et de démocrates, accentuant la pression sur l'administration Obama pour qu'elle cesse de temporiser sur la fourniture d'armes et de matériel militaire lourd aux forces de Kiev.

La Maison-Blanche a annoncé ce mois-ci la livraison à l'Ukraine pour 75 millions de dollars d'équipements militaires non létaux, mais s'est refusée à livrer les armes létales réclamées par Kiev. «J'ai bon espoir que le président va bientôt se mettre d'accord avec nous», a ajouté M. Thornberry.

Le conflit armé dans l'Est séparatiste de l'Ukraine a fait plus de 6000 morts en onze mois. Kiev et les Occidentaux accusent la Russie d'armer la rébellion prorusse et d'avoir déployé des forces régulières dans l'est de l'Ukraine, ce que Moscou dément catégoriquement.