Les violences ont repris de plus belle jeudi à Donetsk, bastion des séparatistes prorusses dans l'est de l'Ukraine, avec un assaut des rebelles contre l'aéroport et un premier bombardement du centre-ville depuis le début de la trêve, il y a près d'un mois.

Sur le front énergétique, une réunion trilatérale entre la Russie, l'Ukraine et l'Union européenne pour tenter de régler le contentieux gazier a été reportée, Kiev n'étant visiblement pas prêt à accepter un compromis avec Moscou tant que l'accord de paix dans l'Est prorusse ne sera pas respecté.

De fortes détonations ont retenti dans le centre de Donetsk vers 18 h heure locale (11 h heure du Québec), selon des journalistes de l'AFP. La mairie a précisé qu'un centre commercial avait été touché par les bombardements. Tous les transports publics ont été interrompus.

Après avoir lancé plusieurs assauts avec des chars dans la matinée contre l'aéroport de la ville aux mains de l'armée ukrainienne, les rebelles ont tiré dans l'après-midi sur les positions des forces gouvernementales dans l'aéroport, a affirmé Kiev. Une épaisse fumée provenant de l'aéroport planait jeudi sur une bonne partie de Donetsk.

«Hier (mercredi), des troupes (rebelles) ont pénétré dans un des terminaux de l'aéroport mais nous ne pouvons confirmer si elles sont encore à l'intérieur ou si elles ont quitté les lieux», a indiqué jeudi à l'AFP une porte-parole séparatiste.

Des rebelles interrogés par l'AFP à un poste de contrôle à 2 km de l'aéroport ont assuré que les insurgés contrôlaient «90% du terminal» et que les soldats ukrainiens semblaient amorcer un mouvement vers le nord.

Responsabilité partagée

En début d'après-midi, les combats qui ont fait «des blessés» se poursuivaient, selon un autre porte-parole ukrainien, Andriï Lyssenko.

Malgré deux accords de cessez-le-feu à Minsk les 5 et 20 septembre, les combats ont fait dix morts mercredi dans un quartier de Donetsk situé à environ 4 km de l'aéroport, lorsque des projectiles se sont abattus sur un arrêt d'autobus et une école, le jour de la rentrée des classes dans les régions rebelles.

Les séparatistes accusent l'armée ukrainienne, qui contrôle l'aéroport, d'être à l'origine des tirs. Amnistie internationale a repris cette accusation, estimant cependant que les rebelles qui «placent des cibles militaires dans des quartiers d'habitation» devaient en «partager la responsabilité».

Moscou a de son côté annoncé mercredi l'inculpation d'un soldat des forces spéciales ukrainiennes pour meurtre de civils. L'homme a été arrêté en Russie où il se trouvait pour chercher du travail, selon le comité d'enquête russe.

Mais Kiev, comme l'OTAN, accuse le Kremlin de jeter de l'huile sur le feu en soutenant les indépendantistes, ce que Moscou dément. L'OTAN a affirmé cette semaine que «des centaines» de soldats russes se trouvaient toujours dans l'est de l'Ukraine, alors que le dernier accord de Minsk prévoit le retrait de tous les combattants étrangers.

«Solution provisoire» sur le gaz russe

Le nouveau secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, a réclamé mercredi «un vrai changement dans les actions de la Russie», estimant que ce pays «maintient sa capacité de déstabiliser l'Ukraine».

À l'approche de l'hiver, le ministre ukrainien de l'Énergie, Iouri Prodan, était attendu jeudi à Bruxelles pour des discussions avec l'Union européenne, qui redoute des coupures de gaz pour ses 28 pays membres si Moscou ne reprend pas ses livraisons à l'Ukraine, coupées en juin. Une réunion à trois avec la Russie pourrait avoir lieu vendredi.

«Nous recherchons une solution provisoire» avec Gazprom, a souligné jeudi le premier ministre ukrainien Arseni Iatseniouk lors d'une rencontre à Kiev avec des investisseurs étrangers. «Aujourd'hui, nous avons des consultations entre l'Union européenne, la Russie et l'Ukraine sur un accord temporaire», a-t-il poursuivi.

Présentant vendredi dernier un «accord intérimaire» devant encore être approuvé par les deux gouvernements, le commissaire européen sortant à l'Énergie, Günther Oettinger, avait expliqué qu'en échange du paiement de 3,1 milliards de dollars avant la fin de l'année, le géant russe Gazprom allait s'engager à fournir au moins 5 milliards de m3 de gaz à l'Ukraine pour lui permettre de traverser l'hiver.

La Russie assure 30 % des importations européennes de gaz, dont la moitié transite par l'Ukraine. Moscou estime que Kiev lui doit 5,3 milliards de dollars d'arriérés de paiement et de pénalités et a menacé l'UE de coupures si des pays membres continuent à vendre du gaz à l'Ukraine via «des flux inversés».