Après avoir menacé Moscou de durcir leurs sanctions, les dirigeants occidentaux du G7 vont s'expliquer directement avec Vladimir Poutine, pour la première fois depuis l'annexion de la Crimée par la Russie.

«La crise Ukraine/Russie était bien sûr la raison pour laquelle nous avons organisé ce G7 à Bruxelles», a souligné le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, au terme du sommet, jeudi à Bruxelles.

Les Occidentaux sont «tout à fait unis» dans leur réaction à la crise en Ukraine, a-t-il assuré. «Nous sommes unis pour condamner la poursuite de la violation par la Russie de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de l'Ukraine. L'annexion illégale de la Crimée par la Russie et les actions visant à déstabiliser l'est de l'Ukraine sont inacceptables et doivent cesser», ont martelé les dirigeants occidentaux.

Si Moscou ne change rien à sa politique en Ukraine, les pays du G7 sont prêts à alourdir leurs sanctions, ont-ils mis en garde. Le président américain, Barack Obama, a donné un maximum de quatre semaines à la Russie pour changer de cap.

«M. Poutine a la possibilité de revenir dans le droit chemin du droit international», a-t-il dit. «Nous allons voir ce que M. Poutine va faire dans les deux, trois, quatre prochaines semaines», a-t-il ajouté.

«Si les provocations russes se poursuivent, il est clair (...) que les pays du G7 sont prêts à imposer des coûts supplémentaires à la Russie», a mis en garde M. Obama.

Ces sanctions, susceptibles de frapper l'économie russe, pourraient être décidées au prochain sommet européen qui se tiendra les 26 et 27 juin, a indiqué la chancelière allemande Angela Merkel.

À ce stade, Paris n'a cependant pas renoncé au juteux contrat de vente de navires militaires Mistral à la Russie, provoquant un certain agacement de ses partenaires.

«J'ai exprimé mes inquiétudes, et je ne pense pas être le seul», a réagi M. Obama. «Il aurait été préférable de suspendre» cette vente, a-t-il ajouté.

La position française est pour le moment de laisser la porte ouverte à un réexamen de ce contrat d'un montant de quelque 1,2 milliard d'euros (près de 1,8 milliard de dollars) d'ici le mois d'octobre, quand le premier des deux navires doit être livré à la flotte russe.

Discussions avec Poutine

Pour autant, le G7 ne veut pas couper les ponts avec la Russie. Dès jeudi soir, à Paris, le premier ministre britannique, David Cameron, doit avoir un entretien en tête-à-tête avec le président russe. «Je vais le mettre en garde contre de nouvelles sanctions s'il n'y a pas de progrès sur la question ukrainienne», a dit M. Cameron.

M. Poutine sera également reçu jeudi soir à l'Élysée par le président français François Hollande. La chancelière allemande Angela Merkel le rencontrera vendredi matin, juste avant les cérémonies officielles du Débarquement allié en Normandie. «Il n'y aucun doute que je verrai» M. Poutine en marge des cérémonies en France, a indiqué M. Obama qui n'a pas exclu de discuter lui aussi avec le président russe.

François Hollande a indiqué quant à lui que M. Poutine pourrait directement discuter avec le président ukrainien Petro Porochenko, sur les plages normandes. «Est-ce que le président Poutine pourra rencontrer le président Porochenko? Oui!», a dit M. Hollande.

«Je ne compte éviter personne et parlerai, évidemment, à tout le monde», avait indiqué le président russe mercredi soir.

Sur le terrain, la situation n'est pas à l'apaisement. Les garde-frontières de l'Est de l'Ukraine, visés par des attaques séparatistes, ont ainsi annoncé jeudi avoir abandonné trois postes à la frontière de la Russie, dont ils demandent la fermeture partielle, et avoir réclamé des renforts de l'armée. La Russie a de son côté évoqué un afflux de plusieurs milliers de réfugiés par jour en provenance de l'Est de l'Ukraine, ce que Kiev a démenti.

Le premier ministre russe Dmitri Medvedev a qualifié de «cynisme sans limites» le soutien exprimé selon lui par le G7 à l'opération armée des forces ukrainiennes contre l'insurrection prorusse dans l'Est du pays. Mais ces critiques ont été sèchement rejetées par les dirigeants du G7.

«Nous maintenons notre position que le gouvernement ukrainien a le droit de restaurer l'ordre, et qu'il le fait d'une manière que nous pouvons qualifier de mesurée», a déclaré M. Van Rompuy. «Nous devons reconnaître que l'Ukraine a fait preuve de beaucoup de retenue depuis le début de la crise» et le rattachement de la Crimée à la Russie, a-t-il ajouté.

Les dirigeants du G7 ont également épinglé Moscou pour la menace que la Russie fait peser sur les approvisionnements de gaz.

«L'utilisation de l'approvisionnement énergétique comme moyen de coercition politique ou comme menace à la sécurité est inacceptable», ont-ils insisté.