L'Américain Richard F. Heck, récompensé mercredi à 79 ans du prix Nobel de Chimie, a consacré sa vie à la recherche après des études en Californie et en Suisse, mais avoue dans un entretien à l'AFP que les retombées de ses découvertes lui échappent désormais totalement.

«Je suis très content de recevoir ce prix», assure M. Heck dans un entretien téléphonique depuis les Philippines, où des dizaines de personnes, selon lui, se sont réunies pour le féliciter.

«Les gens m'avaient dit que (mes travaux) valaient un prix Nobel, donc je n'ai pas été totalement surpris» en le recevant, a reconnu ce professeur émérite de l'université du Delaware (est des Etats-Unis), au visage rond et au front dégarni.

Richard Heck a donné son nom à une réaction chimique peu connue du grand public, mais dont la portée est immense. Elle permet de synthétiser de nombreuses substances présentes dans la nature, ouvrant la voie à des traitements du cancer et à des produits électroniques et plastiques révolutionnaires.

«En fin de compte, c'est devenu une réaction assez utile», juge avec modestie le chimiste à la retraite depuis 1989, ajoutant d'une voix douce se sentir un peu dépassé par les usages actuels de sa découverte. «Je ne suis vraiment pas au fait de tout ce qui se passe actuellement avec cette réaction».

«C'est une réaction de laboratoire utile, avec des applications majeures dans l'industrie. Mais la plupart (de ces applications) sont gardées secrètes parce qu'ils (les industriels) veulent protéger leurs brevets», poursuit M. Heck, qui a jugé que le prix qui lui a été décerné constituait «une très belle conclusion» à ses travaux, selon un communiqué de l'université du Delaware.

Né en 1931 à Springfield, dans le Massachusetts (nord-est), le jeune chimiste obtient son doctorat en 1954 de la prestigieuse université de Californie à Los Angeles (UCLA).

Diplôme en poche, il part étudier en Suisse, à l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) --qu'à fréquenté en son temps le physicien Albert Einstein-- avant de revenir aux Etats-Unis, où il travaillera pour une entreprise de chimie du Delaware, Hercules Powder.

En 1971, il rejoint le département de Chimie et de Biochimie de l'université du Delaware, où il mettra au point la réaction qui le rendra célèbre.

En 2006, son travail est récompensé par la Société américaine de Chimie (ACS), qui souligne «l'impact profond» de ses travaux. «L'importance de cette réaction (Heck) ne saurait être trop soulignée», estime l'ACS.

Richard Heck quittera l'université du Delaware en 1989 pour s'installer en Floride (sud-est). En 2004, l'Université créera un prix à son nom et mettra en place un cours magistral destiné à «reconnaître son rôle de visionnaire dans le domaine de la chimie organométallique et honorer (ses) contributions».