L'accord-cadre conclu entre les grandes puissances et Téhéran sur le dossier nucléaire suscitait samedi de multiples interrogations dans la presse iranienne, notamment sur le calendrier toujours vague de la levée des sanctions internationales qui étouffent l'économie.

La presse conservatrice affichait son scepticisme sur les résultats obtenus en Suisse, profitant du silence observé par le guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, l'ultime décisionnaire dans ce dossier.

La presse réformatrice et modérée saluait le travail des négociateurs iraniens mené par le chef de la diplomatie Mohammad Javad Zarif, mais les journaux conservateurs pointaient les différentes interprétations possibles, au détriment de la République islamique, du document publié à Lausanne.

L'agence de presse Fars a également souligné les différences entre le texte présenté par la délégation iranienne et celui diffusé par le département d'État américain.

«Qui est le véritable gagnant?» s'interrogeait en une le quotidien anglophone Iran News. Vatan-Emrooz (conservateur) se chargeait d'apporter une réponse en affirmant qu'«il y a une grande différence entre ce qu'on donne et ce qu'on reçoit de l'accord de Lausanne». Pour Javan, réputé proche des Gardiens de la révolution, l'armée d'élite du régime, «le victoire résidera dans la lutte entre les différentes interprétations» du texte.

L'ultraconservateur Kayhan reprenait avec ironie l'expression d'un «accord gagnant gagnant: le nucléaire va partir, les sanctions vont rester».

L'Iran veut une levée totale et immédiate des sanctions imposées par l'ONU, les États-Unis et l'Union européenne, contre une levée graduelle évoquée par les grandes puissances.

Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a souligné vendredi que cette question était «un point qui est encore très compliqué» et «pas encore tout à fait réglé».

Les sanctions imposées par les États-Unis seront levées «par étapes», à mesure que Téhéran respecte ses engagements dans le cadre de l'accord final censé être conclu d'ici fin juin, a affirmé jeudi soir le secrétaire d'État américain John Kerry.

«L'accord de Lausanne montre que les choses que l'Iran a acceptées sont claires et vérifiables, mais ce que l'autre côté a accepté est vague et sujet à interprétation», estimait samedi dans un éditorial le directeur de Kayhan, Hossein Shariatmadari. «L'accord parle de suspension des sanctions et pas de leur levée», ajoute le responsable, directement nommé à son poste par l'ayatollah Khamenei.

Mansour Haghighatpour, vice-président de la commission parlementaire sur la sécurité nationale et la politique étrangère, a estimé que les négociateurs avaient outrepassé leurs prérogatives.

«Nous avons offert une clé pour des inspections occidentales sur les installations militaires et le protocole additionnel (du traité de non-prolifération nucléaire), alors que les décisions sur ces questions sont la compétence du Parlement», a-t-il dit, cité par l'agence Tasnim.