Le protectionnisme américain prôné par le président désigné Donald Trump risque de faire mal au Canada et à la Ville de Montréal, d'où l'importance de diversifier les débouchés pour les exportateurs, a dit le maire Denis Coderre, qui prend la tête d'une mission économique en Israël.

«Le protectionnisme, ce n'est pas bon pour nous, parce qu'on est un pays d'exportateurs. On dépend de ces emplois-là», a réagi le maire de Montréal à la suite de l'élection du candidat républicain mardi soir.

Denis Coderre ne va pas jusqu'à se dire inquiet à la perspective de voir les États-Unis mettre en place des mesures protectionnistes, mais reconnaît vouloir demeurer «à l'affût, vigilant».

La Chambre de commerce du Montréal métropolitain dit également suivre la situation de près. «Pour l'instant, la communauté d'affaires d'ici est très attentive», a indiqué son président, Michel Leblanc. Il affirme que les États-Unis n'auraient pas intérêt eux-mêmes à résilier les accords de libre-échange avec le Canada, des centaines de milliers d'emplois américains en dépendent aussi.

Diversification

Le maire Coderre a souligné que, protectionnisme ou non, les États-Unis demeureront le principal partenaire économique du Canada. Les villes comme Montréal doivent toutefois diversifier leur économie pour éviter de pâtir d'un resserrement des frontières.

«Sans mettre de côté que notre principal client, c'est les États-Unis, il faut aussi diversifier les marchés, pas mettre tous nos oeufs dans le même panier. [...] «Plus on va diversifier, plus on va se donner une chance», a-t-il dit.

D'ailleurs, Denis Coderre s'apprête à s'envoler vers Israël pour une mission économique d'une semaine avec son homologue de Toronto, John Tory. La délégation comprendra pas moins de 120 personnes, principalement des entreprises.

Le groupe ne va pas tant à la conquête d'un nouveau marché, Israël abritant à peine 8 millions d'habitants, mais plutôt pour y établir des partenariats avec des entreprises qui pourraient ouvrir des portes sur d'autres marchés lucratifs. «On ne va pas en Israël pour le marché israélien. On y va pour trouver des partenaires, de développement, de commercialisation. Une des forces d'Israël, c'est de mettre des petites entreprises israéliennes avec de grandes multinationales. C'est dans l'intérêt des entreprises d'ici d'être dans cet écosystème», dit Michel Leblanc.

Denis Coderre «surpris»

«Surpris» par le résultat de l'élection américaine, Denis Coderre a évoqué plus tôt le souvenir de la chute du mur de Berlin, une critique à peine voilée envers la principale promesse du candidat républicain d'ériger un mur entre les États-Unis et le Mexique.

« Tout le monde est surpris. Je tenais juste à souligner que, aujourd'hui, c'est le 27e anniversaire de la chute du mur de Berlin », a lancé le maire lors d'une réunion ce matin.

Non seulement l'élection de Trump risque-t-elle d'avoir d'importants impacts avec le Canada. « On aura beaucoup de défis avec ce résultat. Ceci dit, la démocratie a parlé. Mais je sens qu'il va y avoir beaucoup de travail à Ottawa », a dit M. Coderre.

Lors de la soirée électorale d'hier soir, Denis Coderre a tendu la main aux Américains qui seraient tentés de venir s'établir au nord de la frontière. « Veuillez prendre note: notre Bureau d'Intégration des Nouveaux Arrivants de Montréal sera ouvert exceptionnellement après vote Américain... », a-t-il écrit. Il faisait du coup un clin d'oeil aux difficultés du site Internet du ministère canadien de l'Immigration, pris d'assaut cette nuit. Son message, relayé notamment par l'Agence France Presse, a été partagé plus de 3300 fois sur les réseaux sociaux.

Soulignant la panique qui s'est emparée des marchés financiers alors que Trump consolidait sa main mise sur la Maison-Blanche, Denis Coderre a notamment écrit que cette élection plairait à d'autres pays. « Me semble que certains seront contents ce soir si la tendance se maintient... » en mettant une image de Vladimir Poutine applaudissant.

À la veille de l'élection, Denis Coderre avait dit souhaiter une élection d'Hillary Clinton pour éviter de voir les États-Unis s'enfermer dans un « protectionnisme exacerbé » sous Trump. « Si Donald gagne, moi, je bâtis un mur pis j'envoye le bill », avait ironisé le maire de Montréal. Il s'était inquiété de voir le républicain accentuer les tensions entre les communautés ethniques. « Faudrait peut-être se rappeler, les grandes guerres comment ça a commencé », a quant à lui évoqué M. Coderre.

Cette élection survient alors que Denis Coderre s'apprête à s'envoler vers Israël en compagnie du maire de Toronto pour une mission économique d'une semaine.