S'il est réélu, Barack Obama entrevoit la possibilité d'une embellie de ses relations avec les républicains du Congrès. Du coup, ceux-ci mettraient fin à leur stratégie de blocage systématique des initiatives du président démocrate.

«Après l'élection, l'objectif de battre Obama n'aurait plus de sens, parce que je ne briguerai plus la présidence. Je m'attendrais donc à un retour de la coopération», a déclaré le chef de la Maison-Blanche en juin dernier.

N'en déplaise à Barack Obama, il existe au moins un scénario où sa réélection envenimerait plutôt ses relations avec les républicains. Ce scénario, suggéré par les sondages nationaux et locaux, se présenterait le 6 novembre en cas de différence entre le vote populaire et le vote au Collège électoral, l'institution composée de 538 grands électeurs qui élit le président des États-Unis.

Ainsi, Barack Obama pourrait gagner le scrutin présidentiel sans avoir obtenu la majorité des suffrages de la population, comme George W. Bush en 2000 (Al Gore avait recueilli 537 000 voix de plus que ce dernier à l'échelle nationale). Selon les sondages réalisés dans les États-clés de l'élection présidentielle, le président sortant a de bonnes chances de remporter les 270 grands électeurs nécessaires à la victoire. (Chaque État dispose d'un nombre de grands électeurs qui dépend en partie de son poids démographique; à deux exceptions près, le gagnant d'un État récolte tous ses grands électeurs.)

Or, selon les sondages nationaux, Mitt Romney pourrait remporter le vote populaire. La moyenne des sondages nationaux recensés par le site RealClearPolitics lui donne en effet une avance d'environ un point sur son rival.

La réaction des militants républicains à une réélection de Barack Obama sans une majorité du vote populaire - un scénario inédit pour un président sortant - est prévisible. Après avoir douté de la citoyenneté ou de la religion du président, plusieurs d'entre eux n'hésiteraient pas à dire que le démocrate ne représente pas les États-Unis et que le républicain devrait occuper le Bureau ovale à sa place. Leur colère ne manquerait pas d'influencer les élus de leur parti à Washington.

Clivages régionaux

Une différence entre le vote populaire et le vote au Collège électoral mettrait également en relief les clivages régionaux et raciaux aux États-Unis. À la mi-octobre, l'institut Gallup a publié des données révélatrices sur la répartition régionale des intentions de vote de chaque candidat. Barack Obama devançait Mitt Romney par six points dans l'Ouest et par quatre points dans l'Est et le Midwest. Dans le Sud, il accusait un retard de 22 points sur son rival, qui était crédité par Gallup d'une avance de sept points à l'échelle nationale.

Il est donc possible que Mitt Romney parvienne à remporter la majorité du vote populaire grâce à l'appui massif des électeurs des États du Sud, un verdict qui soulèverait sans doute la question du racisme. Il y a deux jours, l'Associated Press (AP) a publié une étude ayant pour but de prédire l'impact de ce phénomène sur l'élection présidentielle. Conclusion: le président sortant pourrait perdre 5% des suffrages à cause des préjugés raciaux qui persistent aux États-Unis.

Selon l'étude de l'AP, 79% des républicains expriment des opinions explicitement racistes, contre 32% pour les démocrates.

Devant ce type de données, les républicains ne manquent pas de souligner que Barack Obama jouit de son côté du soutien massif des électeurs noirs. La semaine dernière, John Sununu, ex-gouverneur du New Hampshire et partisan bien en vue de Mitt Romney, a d'ailleurs attribué à la couleur de sa peau l'appui donné par l'ancien secrétaire d'État Colin Powell, un républicain, au démocrate de la Maison-Blanche.

«Cela n'a pas de sens», a déclaré Barack Obama en répondant à une question sur les propos de John Sununu.

Le président pourrait avoir à répéter la même phrase concernant la réaction des républicains à sa réélection éventuelle sans la majorité des suffrages de la population américaine.