Les États-Unis aidés de leurs alliés arabes ont pour la première fois attaqué mardi les djihadistes de l'État islamique (EI) en Syrie, ouvrant un nouveau front dans la guerre contre ce puissant groupe ultraradical cible de frappes en Irak.

Cette opération marque la première intervention étrangère  depuis le début de la guerre civile en 2011 en Syrie, où l'organisation extrémiste sunnite de l'EI occupe depuis 2013 de vastes régions dans le nord et l'est, frontalières de l'Irak et la Turquie.

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Elle survient au moment où un Français est retenu en otage en Algérie par un groupe djihadiste lié à l'EI. Il a menacé lundi de l'exécuter dans un délai de 24 heures si la France ne cessait pas ses frappes contre l'EI en Irak.

Le régime de Bachar al-Assad, considéré comme illégitime par les États-Unis, a indiqué avoir été informé de ces frappes à l'avance par Washington. Il a ensuite affirmé soutenir «tout effort international» pour combattre les djihadistes.

L'opération de la coalition a été menée au moyen d'avions de chasse, de drones, de bombardiers et de 47 missiles Tomahawk tirés depuis des navires américains opérant dans les eaux internationales de la Mer Rouge et du Golfe, selon le Pentagone.

Cinq «nations partenaires» moyen-orientales -Jordanie, Bahreïn, Qatar, Arabie saoudite, Émirats arabes unis- «ont participé ou appuyé» ces frappes.

Les frappes ont visé des sites d'entraînement, des centres de commandement, des bases, des dépôts et véhicules armés et des camions de ravitaillement dans les régions de Raqa (nord), le centre du pouvoir de l'EI, de Deir Ezzor (nord-est), d'Hassaka (nord-est) et de Boukamal (nord), selon la même source. Les cibles ont été détruites ou endommagées.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), la coalition a mené une quarantaine de raids aériens et d'attaques à l'aide de missiles contre des positions de l'EI et une vingtaine de djihadistes ont été tués.



Al-Qaïda également visé

Les États-Unis ont aussi frappé, seuls, un autre groupe extrémiste dans la région syrienne d'Alep (nord), le «groupe Khorassan» formé d'ex-combattants d'Al-Qaïda, selon le Pentagone. Les frappes «visaient à mettre en échec une attaque imminente préparée par ce groupe contre les États-Unis et les intérêts occidentaux».

Les membres du «groupe Khorassan» sont affiliés à Al-Nosra, la branche syrienne d'Al-Qaïda, a affirmé l'OSDH en faisant état de 50 combattants d'Al-Nosra tués dans les frappes.

L'opposition syrienne modérée a favorablement accueilli les frappes américaines tout en appelant à faire pression sur M. Assad dont elle réclame le départ.

L'opération d'envergure survient alors que l'EI mène une offensive pour s'emparer d'Aïn al-Arab (Kobané en kurde), troisième ville kurde de Syrie, dont le contrôle lui donnerait le contrôle total d'une longue bande de la frontière syro-turque.

Après s'être emparés en une semaine de plus de 60 villages aux environs d'Aïn al-Arab, la progression rapide de l'EI a été ralentie par les combattants kurdes aidés de leurs frères d'armes venus de Turquie, selon l'OSDH.

Craignant les exactions des djihadistes responsables d'atrocités -viols, rapts, exécutions, crucifixions-, plus de 130 000 kurdes syriens ont fui la zone et trouvés refuge en Turquie.

Sur un autre front du conflit syrien, l'armée israélienne a abattu un avion syrien, apparemment un MIG-21, qui s'était approché de la ligne de démarcation sur le plateau du Golan dont une partie est occupée par Israël.

Un otage français menacé d'exécution

Dans sa stratégie antidjihadistes annoncée le 10 septembre dans le cadre d'une coalition regroupant une quarantaine de pays, le président américain Barack Obama avait prévenu qu'il se réservait le droit de frapper le groupe EI y compris en Syrie.

Les frappes américaines contre les positions de l'EI lancées le 8 août dans le nord de l'Irak, auxquelles la France s'est jointe vendredi, avaient ralenti l'avancée djihadiste et aidé les forces irakiennes et kurdes à reprendre certains secteurs aux djihadistes.

À la veille des raids en Syrie, l'EI a appelé ses partisans à tuer les citoyens, notamment américains et français, des pays membres de la coalition.

Quelques heures plus tard, le groupe djihadiste algérien «Jund al-Khilafa», qui soutient l'EI, revendiquait le rapt d'un Français, enlevé dimanche soir à Tizi Ouzou, à l'est d'Alger.

La vidéo montre Hervé Pierre Gourdel, un guide de 55 ans, assis par terre entouré de deux hommes masqués et armés. «Je laisse à Hollande, le président de l'État français criminel, le soin d'arrêter les attaques contre l'EI dans les 24 heures qui suivent la publication de ce communiqué ou Hervé Gourdel sera égorgé», déclare l'un d'eux.

La France a rejeté l'ultimatum en assurant vouloir continuer de frapper en Irak, alors que des troupes d'élite de l'armée algérienne passaient au peigne fin une zone montagneuse à l'est d'Alger pour tenter de localiser l'otage.

L'EI a diffusé depuis fin août trois vidéos montrant la décapitation de deux journalistes américains et d'un humanitaire britannique enlevés en Syrie.

IMAGE AP/MARINE AMÉRICAINE

Sur cette image diffusée le 23 septembre par la Marine américaine, des missiles visant des positions de l'EI en Syrie sont tirés depuis ce navire américain.