Le groupe armé État islamique (EI) était pointé du doigt vendredi par des militants syriens après la confirmation par l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) du recours pour la première fois de gaz moutarde durant des combats en Syrie en août.

D'autre part, dans le centre du pays, le régime de Bachar al-Assad a perdu la dernière des positions conquises au cours du mois dernier avec l'aide de l'aviation russe, a annoncé l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

Les experts en armes chimiques de l'OIAC ont conclu, sans désigner de responsables conformément au statut de leur organisation, que du gaz moutarde avait été utilisé le 21 août à Marea, une localité syrienne frontalière de la Turquie et tenue par les rebelles.

Mais le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane, a affirmé vendredi à l'AFP que «l'État islamique a utilisé des gaz toxiques durant son attaque en août contre Marea».

Présent à Marea le jour de l'attaque, Mamoun al-Khatib, un journaliste de Shahba Presse, une agence prorebelle, a indiqué à l'AFP par courriel: «Nous savions que c'était l'EI, car tous les obus étaient tirés de l'est de Marea et cette région était complètement aux mains de l'EI».

Et pour un autre militant, Nazir al-Khatib, «ce rapport arrive trop tard et n'est pas suffisant, car il ne désigne pas l'EI comme le responsable des tirs de gaz moutarde».

L'EI tentait depuis des mois de prendre Marea, considéré comme le plus important réservoir de rebelles et d'armes dans la province d'Alep (nord).

Médecins sans Frontières (MSF), qui à l'époque avait indiqué avoir soigné quatre civils d'une même famille exposés à des agents chimiques, a refusé de se prononcer sur les auteurs.

«MSF ne fait pas de commentaire tant qu'elle ne possède pas de preuve absolue sur l'identité des auteurs et nous ne les avons pas pour le moment», a affirmé vendredi à l'AFP un porte-parole, Yazan al-Saadi.

Reste l'origine de ce gaz moutarde. Pour Rami Abdel Rahmane, «il ne venait pas de Syrie, mais probablement de Turquie ou d'Irak». En revanche, selon lui, l'EI s'était procuré du chlore dans des usines de la région d'Alep en 2014.

«Échec»

Pour Nazir al-Khatib, soit l'EI compte dans ses rangs «des experts (formés sous) le régime de Saddam Hussein en Irak et qui l'ont aidé à obtenir ces produits» chimiques, soit le groupe extrémiste «les a obtenus dans les dépôts du régime à Palmyre», une ville du centre du pays entre les mains du groupe.

Damas est censé avoir détruit tout son arsenal chimique aux termes d'un accord américano-russe de septembre 2013 qui lui a permis d'éviter des bombardements occidentaux.

Dans le centre de la Syrie, des groupes islamistes, dont Ahrar al-Cham, se sont emparés vendredi d'Atchane et de localités proches, récupérant ainsi toutes les localités prises par le régime syrien il y a un mois dans la province de Hama, selon l'OSDH.

L'armée syrienne, appuyée par des milices prorégime et par des bombardements russes, avait pris le contrôle d'Atchane le 10 octobre.

Seize membres de l'armée syrienne et de groupes prorégime et au moins sept rebelles ont été tués dans les combats à Atchane, a indiqué à l'AFP Rami Abdel Rahmane.

«Tous les gains réalisés par les forces du régime avec l'appui des bombardements russes (dans la région) ont été perdus. C'est un échec» pour le régime de Bachar al-Assad, a-t-il affirmé.

Jeudi, l'armée avait perdu au profit des djihadistes de Jund al-Aqsa Morek, la seule localité qui était aux mains de l'armée depuis 2014 sur l'autoroute-clé entre Alep et Hama.

La Russie, fidèle alliée du régime syrien, dit mener une campagne de frappes aériennes contre les groupes «terroristes», dont l'EI.

En tout cas, les missiles antichars de fabrication américaine TOW semblent plus efficaces sur le terrain que les bombardements aériens. Selon le «Bureau des forces révolutionnaires en Syrie», les rebelles ont détruit 123 chars de l'armée syrienne en octobre, et chaque jour, les insurgés postent sur Twitter des vidéos d'attaques avec ces missiles.

Déclenché en 2011 après la répression sanglante de manifestations réclamant des réformes, le conflit en Syrie est devenu complexe au fil des années, avec une multiplication des acteurs, locaux et étrangers, sur un territoire de plus en plus morcelé. Il a causé la mort de plus de 250 000 personnes et poussé à la fuite des millions de Syriens.