Les combattants kurdes de Syrie progressaient samedi en direction de la ville de Tal Abyad, tenue par le groupe djihadiste État islamique (EI), poussant des milliers d'habitants à fuir vers la Turquie voisine qui les a repoussés à coups de canons à eau et de tirs d'avertissement.

Toujours à la frontière syro-turque, mais plus à l'ouest, des rebelles syriens ont chassé du village d'Al-Bal les jihadistes de l'EI qui cherchent à couper un point d'approvisionnement clé des insurgés situé non loin de là.

L'offensive vers Tal Abyad des forces kurdes -qui sont aidées par des frappes de la coalition antidjihadiste menée par les États-Unis- a débuté jeudi, avec un assaut contre la localité de Soulouk, à une vingtaine de kilomètres au sud-est de Tal Abyad.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), les Unités de protection du peuple kurde (YPG) ont encore avancé samedi à l'est et l'ouest de Tal Abyad, une ville stratégique pour l'EI qui l'utilise pour le passage de ses combattants. Elle est située dans la province de Raqa, le bastion du groupe extrémiste sunnite en Syrie.

Le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane, a indiqué que la plupart des jihadistes s'étaient retirés de Soulouk samedi, mais avaient piégé des maisons et posé des mines dans les rues.

Selon lui, les combats et raids aériens autour de Soulouk ont tué 16 membres de l'EI et au moins trois civils samedi.

D'après l'OSDH, les YPG, qui bénéficient aussi du soutien d'autres combattants rebelles syriens, «veulent assiéger» Tal Abyad, dont elles ne sont plus qu'à cinq kilomètres au sud-est.

Par ailleurs, samedi soir, plusieurs silhouettes d'hommes en tenue de combat et armés de fusils, appartenant apparemment à l'EI, ont été vues à partir de la Turquie arrivant à la frontière du côté syrien, sous le regard inquiet des soldats turcs.

L'objectif des forces kurdes est de prendre le contrôle de la totalité de la route reliant la ville kurde de Kobané, située également à la frontière turque et libérée en janvier, à Qamishli, localité à majorité kurde frontalière de l'Irak.

Selon le militant syrien Arin Chekhmos, les forces kurdes et rebelles alliées cherchent à nettoyer l'ensemble de la frontière nord des djihadistes. «Les groupes syriens qui combattent aux côtés des Kurdes (...) ont indiqué qu'après avoir libéré Tal Abyad, ils se dirigeraient vers la ville de Raqa», a-t-il dit à l'AFP.

Les combats dans le Nord syrien ont poussé les habitants à fuir, soit vers la ville de Raqa, soit vers la frontière turque.

Depuis la semaine dernière, plus de 13 500 réfugiés ont franchi la frontière avec la Turquie. Face à ce nouvel afflux, le vice-premier ministre turc Numan Kurtulmus a annoncé mercredi soir la fermeture provisoire de cette frontière.

Milliers de réfugiés à la frontière

Les forces de sécurité turques ont eu recours samedi à des canons à eau et à des tirs d'avertissement pour repousser les Syriens qui voulaient franchir la frontière, selon un photographe de l'AFP.

Des milliers de réfugiés étaient massés derrière les barbelés érigés au niveau du point de passage frontalier turc d'Akçakale.

La Turquie, qui a rompu avec le régime du président Bachar al-Assad, est le principal pays d'asile des réfugiés syriens qui fuient la guerre civile. Elle en accueille aujourd'hui officiellement plus de 1,8 million.

Plus à l'ouest, les rebelles ont repoussé vendredi soir les jihadistes de l'EI du village d'Al-Bal, dans la province d'Alep, a affirmé l'OSDH.

Al-Bal se situe à une dizaine de kilomètres du passage de Bab al-Salama à la frontière turque, principal point d'approvisionnement des rebelles en armes et combattants. «L'objectif ultime de l'EI est de couper ce passage», a expliqué M. Abdel Rahmane.

Les combats ont fait au moins 29 morts en moins de 24 heures --14 rebelles et 15 jihadistes, de même source.

Plus au sud, d'après des militants, de violents combats opposaient djihadistes et rebelles dans les environs de Marea, un des principaux fiefs de la rébellion dans la province d'Alep que l'EI veut à tout prix capturer.

«L'EI tente d'encercler la ville en occupant les villages tout autour», a déclaré à l'AFP Mamoun Abou Omar, directeur d'une agence de presse locale.

La guerre en Syrie, qui a commencé par des manifestations anti-régime pacifiques en 2011, réprimées dans le sang, est devenue un conflit complexe aux fronts multiples.

Au cours des derniers mois, la rébellion a infligé des revers au régime dans le nord, notamment dans la province d'Idleb, et dans le sud, mais elle reste menacée par l'EI qui veut gagner du terrain à la fois aux dépens du régime et des insurgés.

Le groupe extrémiste sunnite, qui contrôle 50% de la Syrie, s'est également emparé depuis l'an passé de pans entiers du territoire irakien.