Le secrétaire d'État américain John Kerry a sommé vendredi la Corée du Nord de renoncer à tout tir de missile, en la mettant en garde contre «une énorme erreur», alors que Pyongyang menace désormais le Japon d'une frappe nucléaire.

«Si (le dirigeant nord-coréen) Kim Jong-Un décide de lancer un missile, que ce soit à travers la mer du Japon ou dans une autre direction, il choisira délibérément d'ignorer la totalité de la communauté internationale», a déclaré M. Kerry lors d'une conférence de presse à Séoul, première étape de sa tournée de trois jours en Asie.

«Ce serait une énorme erreur pour lui de faire cela, car cela isolerait encore un peu plus son pays», a-t-il lancé, en jugeant «inacceptable» la rhétorique guerrière de Pyongyang.

Via un éditorial publié vendredi soir par l'agence de presse officielle KCNA, Pyongyang a menacé le Japon de ses «flammes nucléaires». Il a qualifié de «provocatrices» les déclarations de Tokyo sur son intention d'intercepter tout  missile que lancerait Pyongyang et qui menacerait le territoire nippon.

«Le Japon est toujours dans la ligne de mire de notre armée révolutionnaire», a prévenu le régime nord-coréen.

Le ministère japonais de la Défense n'a pas souhaité commenter, mais a indiqué qu'il allait «prendre toutes les mesures possibles pour répondre à tout type de scénario».

En prévision d'un ou plusieurs tirs de missiles de moyenne portée qui pourraient intervenir très prochainement, peut-être dès lundi, jour anniversaire de la naissance du fondateur de la Corée du Nord, Tokyo a donné à l'armée japonaise l'autorisation formelle de détruire tout missile nord-coréen qui menacerait le territoire nippon.

Par précaution, le ministère japonais des Transports a ordonné que les pilotes des avions qui passeraient à proximité de la principale base des États-Unis à Okinawa, dans le sud de l'archipel nippon, se signalent préalablement à l'armée américaine.

Le secrétaire d'État américain a appelé une fois de plus Pékin, où il se rend samedi, à exercer son influence sur son allié nord-coréen.

Les dirigeants nord-coréens «doivent se préparer à vivre selon les obligations et les critères internationaux qu'ils ont acceptés», a déclaré M. Kerry, et Pékin a selon lui «un énorme potentiel pour faire la différence à ce sujet».

C'est aussi l'avis de son homologue français, Laurent Fabius, présent à Pékin pour préparer une visite du président François Hollande et qui s'est entretenu vendredi avec le président chinois Xi Jinping et avec le chef de la diplomatie chinoise Wang Yi.

«Les Chinois nous ont dit aussi qu'ils faisaient le maximum d'efforts pour que la tension soit réduite», a déclaré M. Fabius au cours d'une conférence de presse.

À la question de savoir si la France soutenait un renforcement des sanctions internationales contre Pyongyang, M. Fabius a répondu: «Oui, si cela peut être efficace».

Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov s'est pour sa part déclaré favorable à des discussions à six sur la Corée du Nord en Suisse, comme Berne l'a proposé.

Des discussions à six entre la Chine, la Corée du Sud, la Corée du Nord, la Russie, les États-Unis et le Japon se sont tenues à six reprises de 2003 à 2007. Mais en 2009 Pyongyang a annoncé son retrait de ce cadre de discussions, après des sanctions des Nations Unies pour son programme nucléaire.

La Maison-Blanche est intervenue vendredi dans la controverse sur la question de la capacité de la Corée du Nord à lancer des missiles équipés d'une tête nucléaire.

«La Corée du Nord n'a pas démontré la capacité à déployer un missile à tête nucléaire», a déclaré le porte-parole de la Maison-Blanche, Jay Carney, soulignant que les États-Unis prenaient tout de même des «mesures de prudence nécessaires» dans la crise actuelle.

Jeudi, un représentant républicain du Colorado, Doug Lamborn, avait cité un rapport du renseignement militaire américain, la Defense Intelligence Agency (DIA), selon lequel Pyongyang disposerait de la capacité de miniaturiser une arme nucléaire et de la monter sur un missile balistique, mais avec une fiabilité «faible».

Sous couvert de l'anonymat, un haut responsable américain avait ensuite déclaré à l'AFP que les États-Unis «ne pensent pas» que la Corée du Nord ait cette capacité.

Le Pentagone s'était lui aussi distancié des déclarations du parlementaire.

De même, pour le ministère sud-coréen de la Défense, «la Corée du Nord a conduit trois essais nucléaires, mais il reste douteux que la Corée du Nord ait fabriqué une tête nucléaire suffisamment petite et légère pouvant être montée sur un missile».

Toutefois, le Nord «se dirige vers cette étape», a déclaré à la presse le porte-parole du ministère, Kim Min-Seok.