Nouvelle audience, nouveau bain médiatique pour le fondateur de WikiLeaks. Les avocats de Julian Assange sortent l'artillerie lourde en vue de son procès en février: la publication de l'argumentaire juridique contre son extradition vers la Suède. Un expert interrogé par La Presse estime que le dossier est «solide».

Il suffit maintenant de deux mots pour faire accourir la presse internationale: «Julian» et «Assange». Malgré la brièveté de son audience, hier, qui n'était qu'une formalité pour confirmer l'ouverture de son procès le 7 février, le fondateur de WikiLeaks était attendu par une centaine de journalistes et de photographes au tribunal de Belmarsh.

À l'entrée de la salle d'audience, Julian Assange avait le regard serein malgré ses traits tirés. À l'intérieur, il a levé les pouces vers ses supporters, au balcon.

D'autres manifestants bravaient le froid à l'extérieur. «Il se bat contre des gouvernements opaques, explique l'étudiante Raya Alfa, d'origine irakienne. Il est un gardien de notre liberté d'expression.»

La sortie de Julian Assange fut moins triomphante qu'à sa mise en liberté, en décembre. «Nous sommes déterminés à poursuivre notre travail à WikiLeaks, a-t-il dit, en cherchant quelque peu ses mots. De nouveaux câbles diplomatiques seront publiés dans nos journaux partenaires.»

Il n'a pas soufflé mot des accusations d'agressions sexuelles qui pèsent sur lui, à l'origine de la demande d'extradition de la Suède.

Peine de mort

Ses avocats ont néanmoins obtenu la permission de diffuser leur plaidoyer en ligne.

L'argument le plus ambitieux du document de 35 pages a trait à la justice américaine. Si la Suède obtient l'extradition de l'Australien de 39 ans, elle pourrait le livrer aux États-Unis, où des politiciens ont souhaité publiquement sa mort. Dans ce cas, allèguent les avocats Mark Stephens et Geoffrey Robertson, il y a un «vrai risque» que Julian Assange soit assujetti à la peine de mort.

C'est le maillon faible de la défense, soutient l'avocat Michael O'Kane. «Cela fait trop de «si» pour la justice britannique», dit l'expert de la firme Peters&Peters, joint par téléphone.

Plus tôt dans la journée, le chef de WikiLeaks s'est dit victime de la même «rhétorique violente» qui aurait mené à la tuerie de Tucson, aux États-Unis.

Autobiographie en avril

Ses avocats soutiennent aussi que les demandes d'extradition sont recevables, en Grande-Bretagne, seulement à des fins d'inculpation. Or, soulignent-ils, la procureure suédoise Marianne Ny, dont ils mettent en doute l'autorité, cherche à interroger Julian Assange, et non à le juger.

Selon l'avocat Michael O'Kane, il s'agit de leur meilleure carte. «C'est un argument solide, très embarrassant pour les autorités suédoises. Ce sera intéressant de voir leur réponse; elles pourraient décider de l'accuser formellement», avance-t-il.

Julian Assange, qui vient de lever le voile sur les difficultés financières de WikiLeaks, publiera une biographie en avril pour couvrir ses frais d'avocats et remettre à flot les activités de son site. Son contrat avec la maison d'édition britannique Canongate lui rapportera au moins 1,5 million de dollars.