Il est 14h30 et le soleil plombe sur les 400 000 réfugiés somaliens dans le camp de Dadaab, dans le nord-est du Kenya. Habituellement, à cette heure, la clinique de Médecins sans frontières grouille de monde. Mais pas cet après-midi: les employés, qui jeûnent pendant le ramadan, ont décidé de fermer boutique plus tôt, au grand désespoir de leur patron.

«Les années précédentes, il n'y avait pas de crise, et les cliniques fermaient tôt pendant le ramadan. Mais cette année, ce n'est pas possible. On ne pourra pas permettre ça», a dit à La Presse le Dr Mohamed Gedy qui, au début de ce mois sacré pour les musulmans, a dû rappeler à l'ordre ses employés.

Malgré la sécheresse et la famine, la majorité des travailleurs humanitaires et des réfugiés somaliens que La Presse a rencontrés affirment qu'ils observeront le jeûne du ramadan. Pendant ce mois lunaire, qui a débuté le 1er août, les croyants doivent s'abstenir de boire et manger du lever au coucher du soleil.

«Les conditions dans lesquelles nous vivons sont déjà tellement difficiles. Le ramadan les complique encore, se désole Mahmoud Jama, réfugié de longue date. Les gens qui arrivent à Dadaab pour échapper à la famine jeûnent déjà depuis des semaines par la force des choses. Nous allons rappeler à tout le monde que les gens malades, les aînés et les enfants sont exemptés du ramadan», promet Mahmoud Jama, en espérant que tous entendront raison.

Si le ramadan est synonyme de privation pour plusieurs, il rime aussi avec générosité dans le monde musulman. Les croyants sont invités à donner à des organismes de charité. Les gouvernements de pays musulmans se sont aussi montrés particulièrement généreux. Hier, le gouvernement turc a notamment envoyé deux cargaisons d'aide humanitaire en Somalie. Au Kenya, une organisation a invité tous les Kenyans, musulmans ou chrétiens, à sauter le repas du midi et à offrir les sommes épargnées aux victimes de la sécheresse dans leur propre pays. À ce jour, l'initiative a permis de récolter 182 millions de schillings kenyans, l'équivalent de 2 millions de dollars.

Famine et malnutrition: des définitions

Malnutrition

Selon l'UNICEF, les gens souffrent de malnutrition si leur régime ne comprend pas suffisamment de calories et de protéines pour que le corps se développe ou reste en bonne santé, ou s'ils ne sont pas capables de mettre à profit la nourriture qu'ils consomment à cause d'une maladie (dénutrition). La malnutrition aiguë sévère est pour sa part définie par un très faible rapport poids-taille et une émaciation sévère. On évalue à 800 000 le nombre d'enfants souffrant de malnutrition dans la région de la Corne de l'Afrique frappée par la pire sécheresse en 60 ans. Près de 640 000 d'entre eux sont en Somalie.

Famine

L'état de famine est déclaré dans une région si la malnutrition aiguë sévère atteint 30% des enfants de moins de 5 ans et si 2 personnes sur 10 000 meurent des conséquences du manque de nourriture quotidiennement. Pour le moment, l'ONU estime que la famine sévit dans cinq régions du sud de la Somalie mais qu'elle pourrait s'étendre au reste du pays dans les quatre semaines à venir.

 

Photo: Reuters

La famine s'étend comme une tache d'huile dans la Corne de l'Afrique. Cette semaine, les Nations unies ont annoncé que cinq régions de la Somalie sont maintenant atteintes et que le pays en entier pourrait sombrer dans la famine d'ici un mois.