Les autorités libyennes doivent mettre fin à la «détention indéfinie» de milliers d'immigrants, y compris des réfugiés et des demandeurs d'asile, dont certains sont soumis à la torture, estime Amnesty International dans un rapport publié jeudi.

L'organisation internationale de défense des droits de l'Homme, basée à Londres, déplore dans le même temps que l'Union européenne aide le gouvernement libyen à «renforcer la sécurité des frontières (...) afin de freiner 'l'immigration clandestine' vers l'Europe, aux dépens des droits de l'Homme».

Elle dénonce «le traitement inacceptable de milliers de ressortissants étrangers, la plupart originaires d'Afrique sub-saharienne, qui font l'objet d'arrestations arbitraires et sont détenus pendant de longues périodes dans des conditions déplorables».

L'ONG  affirme avoir visité  sept «centres de rétention» -comme  les appellent les autorités libyennes- et fait état de «preuves de mauvais traitements, assimilables à la torture pour certains cas».

«Plusieurs détenus, y compris des femmes, ont été frappés brutalement à l'aide de tuyaux d'eau ou de câbles électriques», ajoute-t-elle en affirmant  avoir recueilli par ailleurs des témoignages de détenus blessés par balle lors d'émeutes.

«La torture et les mauvais traitements que nous avons découverts dans les +centres de rétention+ sont inacceptables», dit Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord de l'ONG.

Sur l'aide de l'UE pour freiner l'immigration clandestine, elle a jugé «profondément troublant de constater que les fonds de l'UE semblent avoir été utilisés pour financer des centres de détention où des milliers de ressortissants étrangers sont illégalement détenus».

L'ONG exhorte l'UE à ne plus conclure de nouveaux accords avec la Libye dans ce domaine, jusqu'à ce qu'elle «démontre son respect des droits des réfugiés, demandeurs d'asile et migrants».

Selon l'organisation, depuis mai 2012, les autorités libyennes ont expulsé 25 000 personnes entrées «'illégalement'« en Libye, un pays de transit et de destination pour des dizaines de milliers d'immigrants africains souhaitant se rendre en Europe.

Considérés comme une «menace pour la sécurité nationale», des milliers d'immigrants ont été maintenus en détention durant des mois avant leur expulsion, sans avoir accès à un avocat.

«Les autorités libyennes doivent revoir leur législation en fixant un délai maximal de détention des migrants en attente d'expulsion», a indiqué Mme Hadj Sahraoui.

Au moment des visites, AI a recensé un total de 5000 réfugiés, demandeurs d'asile et  migrants détenus dans 17 «centres de rétention» dépendant du ministère de l'Intérieur, «en plus d'un nombre inconnu de personnes détenues par les milices».

L'organisation a regretté aussi des «normes d'hygiène extrêmement précaires», exposant les détenus aux risques de maladies, y compris les infections des voies respiratoires et la diarrhée chronique.