La Russie a bombardé intensément par air et par mer des fiefs du groupe État islamique (EI) dans l'est de la Syrie, faisant des dizaines de morts, au moment où l'ONU autorisait toutes les mesures nécessaires pour combattre l'organisation djihadiste.

Les frappes vendredi de l'aviation russe et de celle du régime syrien à Deir Ezzor sont les plus intenses dans cette province depuis le début du conflit en mars 2011, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

«Au moins 36 personnes, dont 10 enfants, ont été tuées et des dizaines blessées dans plus de 70 raids menés par des appareils russes et syriens contre les localités de la province. C'est le plus violent bombardement de cette région depuis le début de la révolte», a dit à l'AFP Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH.

Les raids ont visé la capitale provinciale éponyme, les villes de Mayadine et Boukamal ainsi que des localités et trois champs pétroliers, a précisé l'ONG qui s'appuie sur un large réseau de sources et de militants à travers le pays.

La province de Deir Ezzor, qui renferme d'importants champs pétroliers, est tenue par l'EI qui contrôle aussi la majorité de la capitale provinciale, à l'exception de l'aéroport militaire et de quartiers aux alentours aux mains du régime.

De violents combats se poursuivaient samedi entre l'EI et les forces du régime autour de cet aéroport, au lendemain d'affrontements qui ont fait une trentaine de morts, dont 22 djihadistes, toujours selon l'OSDH.

Alliée du régime syrien, la Russie a intensifié ses bombardements contre l'EI, le président Vladimir Poutine promettant de riposter à l'attentat à l'origine de l'écrasement d'un avion russe en Égypte, revendiqué par l'EI.

«Menace mondiale»

Outre les raids aériens, impliquant notamment ses bombardiers stratégiques, les navires de la flottille de la Caspienne ont tiré 18 missiles de croisière sur des cibles de l'EI dans les provinces de Raqa (nord-est), d'Idleb (nord-ouest) et d'Alep (nord-ouest).

«Rien qu'avec un tir de missile de croisière sur une seule cible dans la province de Deir Ezzor, plus de 600 combattants ont été tués», a annoncé le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, vendredi, sans préciser la date du tir.

C'est la deuxième fois que des missiles de croisière tirés depuis la mer Caspienne sont utilisés par la Russie, dont l'intervention militaire en Syrie a débuté le 30 septembre.

Moscou a affirmé cette semaine qu'elle ciblerait les camions-citernes de l'EI qui contrôle la majorité des champs pétroliers de Syrie et tire grand profit du commerce du pétrole.

À la tête d'une coalition internationale dont ne fait pas partie Moscou et qui frappe l'EI en Syrie et en Irak voisin, les États-Unis ont eux affirmé qu'ils cibleraient davantage au portefeuille l'EI.

Après la revendication par l'EI de l'attentat à la bombe contre l'avion russe (224 morts le 31 octobre) et des attentats de Paris (130 morts le 13 novembre), la communauté internationale était plus que jamais décidée à combattre ce groupe responsable de multiples atrocités.

À New York, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté vendredi à l'unanimité une résolution proposée par la France appelant les États membres à «prendre toutes les mesures nécessaires pour combattre l'organisation EI sur le territoire contrôlé par l'EI en Syrie et en Irak».

Vols déroutés au Liban

Conséquence inattendue des attentats de Paris et contre l'avion russe, la France et la Russie ont initié une coopération inédite contre l'EI.

M. Poutine a ordonné à ses navires de guerre en mer Méditerranée d'entrer en «contact direct» avec le porte-avions Charles-de-Gaulle qui sera «sur zone» à la fin de la semaine. Londres et Bruxelles ont annoncé le déploiement de navires de guerre pour accompagner le Charles-de-Gaulle.

Le Liban, pays voisin de la Syrie, a quant à lui été contraint de dérouter par le sud des avions au départ et à l'arrivée de Beyrouth après une demande de la Russie d'éviter une zone en Méditerranée où elle prévoit d'effectuer trois jours de manoeuvres militaires à partir de samedi.

Aucune annonce n'a été faite toutefois à Moscou.

Même si la communauté internationale est unie dans la lutte anti-EI, des divergences persistent sur les moyens de régler le conflit syrien, la Russie cherchant à associer le régime de Bachar al-Assad à toute solution alors que les Occidentaux réclament le départ du chef de l'État syrien.

Déclenché en mars 2011 par la répression de manifestations pacifiques réclamant des réformes, le conflit syrien -qui a fait plus de 250 000 morts- est devenu complexe avec une multiplication des acteurs, locaux et étrangers, sur un territoire de plus en plus morcelé.