Les experts internationaux ont supervisé dimanche la destruction des premières têtes de missiles, de bombes et d'équipements visant à fabriquer des armes chimiques en application d'une résolution de l'ONU votée après une attaque chimique particulièrement meurtrière dans ce pays dévasté par la guerre.

Les experts ont supervisé des personnels syriens qui «ont utilisé des lances thermiques et des meuleuses pour détruire ou mettre hors d'usage une série de matériels», indique un communiqué publié à New York par les Nations unies et par l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC).

Cette première opération de desctruction de l'arsenal chimique syrien a été saluée dimanche par le Secrétaire d'État amricain John Kerry qui a rendu hommage au «consentement» de Damas.

«Le processus a démarré en un temps record et nous en sommes reconnaissants à la Russie, pour sa coopération, mais bien entendu aussi envers la Syrie, pour son consentement», a déclaré M. Kerry lors d'une conférence de presse conjointe à l'issue d'un entretien avec son homologue russe Sergueï Lavrov sur l'île indonésienne de Bali.

Le travail de la mission conjointe de ces deux organisations internationales s'est poursuivi dimanche sur fond de violences sur le terrain avec une nouvelle attaque aux obus contre Damas, qui a fait huit morts dans le quartier chrétien de Qassaa selon les médias officiels, et des combats entre rebelles et soldats sur plusieurs fronts à travers le pays.

Plus de deux ans et demi après le début du conflit, déclenché en mars 2011 par une contestation pacifique qui s'est ensuite militarisée face à la répression, le président Bachar al-Assad a de nouveau admis avoir commis des «erreurs» et s'est engagé par ailleurs à faciliter le travail des experts en armes chimiques, dans une interview au Der Spiegel.

Ces experts ont pour mission de détruire un arsenal estimé à mille tonnes, dont des centaines de gaz moutarde ou encore de gaz sarin, réparties dans des dizaines de sites, le tout dans un pays en guerre, une première pour une mission de désarmement chimique.

«Le processus de destruction du programme syrien d'armes chimiques a commencé aujourd'hui», indique le communiqué, confirmant des indications données par un responsable de l'ONU à Damas.

Les deux équipes d'experts, arrivés mardi en Syrie, s'emploient aussi à «surveiller, vérifier et rapporter» la concordance des informations fournies par le gouvernement syrien avec la situation réelle de son arsenal chimique.

«Destruction et vérification»

«Le processus de destruction et de démantèlement est mené par les Syriens, sous la supervision de notre équipe, qui vérifiera et confirmera ensuite que cela a été fait de façon appropriée», avait indiqué plus tôt une source au sein de l'équipe OIAC-ONU.

Le secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon devrait adresser lundi un rapport au Conseil de sécurité, présentant en détail la logistique de ce qui est considéré comme la plus importante et la plus dangereuse opération du genre, compte tenu du conflit en cours en Syrie.

L'équipe sur le terrain est chargée de faire appliquer la résolution 2118 du Conseil de sécurité, la première votée sur le conflit syrien grâce à un accord russo-américain prévoyant le désarmement chimique du pays d'ici mi-2014.

Cet accord a éloigné la menace des frappes américaines contre le régime, après l'attaque du 21 août qui a fait des centaines de morts et qui a été attribuée aux forces syriennes par l'Occident et l'opposition.

Dans son interview au Spiegel, M. Assad a nié encore une fois toute responsabilité dans cette attaque.

Il a par ailleurs affirmé que son gouvernement était «très transparent» avec l'équipe de l'OIAC et de l'ONU.

«Les experts pourront se rendre sur tous les sites. Ils récupéreront toutes nos données, les vérifieront, et ensuite ils pourront juger de notre crédibilité», a dit M. Assad au Spiegel.

Assad reconnaît des «erreurs»

Il a également de nouveau reconnu des «erreurs» dans la gestion du début du soulèvement contre son régime. «Dès que des décisions politiques sont prises, il y a des erreurs. Partout dans le monde. Nous ne sommes que des hommes».

«Des erreurs personnelles ont été commises (...) Même un président commet des erreurs», a insisté Bachar al-Assad, ajoutant toutefois que ses «décisions fondamentales étaient justes».

Interrogé sur une éventuelle responsabilité totale de l'opposition dans les massacres dans le pays, M. Assad a répondu que «la réalité n'est pas noire ou blanche».

«On ne peut pas dire "ils sont responsables à 100% et nous pas du tout"», a-t-il ajouté. «La réalité n'est pas noire ou blanche, il y a aussi une palette de gris. Mais il est correct de dire que nous nous défendons».

Alors que sur le terrain les protagonistes sont déterminés à se battre jusqu'au bout et que les efforts pour les réunir ont échoué jusque-là, Lakhdar Brahimi, l'émissaire international pour la Syrie, espère parvenir à rassembler les deux camps lors de la conférence dite Genève 2 qui a été maintes fois reportée et pourrait se tenir en novembre.

«J'essaye d'inviter tout le monde au cours de la deuxième moitié de novembre... On va voir. Je suis réaliste», a déclaré M. Brahimi lors d'une émission de la chaîne TV5 et de la radio RFI.

Le conflit en Syrie a fait plus de 115 000 morts selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) et poussé à la fuite de leurs foyers des millions de personnes.