Les observateurs de l'ONU sont finalement arrivés vendredi sur les lieux du massacre d'Al-Koubeir en Syrie, où l'escalade de la violence a poussé l'émissaire international Kofi Annan à réclamer davantage de pressions sur le régime de Bachar al-Assad.

Dans le même temps, des milliers de Syriens ont manifesté à travers le pays contre le régime de Bachar al-Assad, tout en exprimant leur exaspération à l'égard de la communauté internationale, impuissante à faire cesser les violences qui ensanglantent le pays depuis le début de la révolte en mars 2011.

Mercredi, 55 personnes dont des femmes et des enfants ont été tués à Al-Koubeir, un hameau de la province de Hama (centre), selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) et l'opposition syrienne, qui l'ont imputé aux forces fidèles au régime.

Mais ce dernier a démenti qu'un tel massacre ait eu lieu, affirmant que seules neuf personnes avaient été tuées par des « groupes terroristes », appellation utilisée par les autorités pour désigner l'opposition.

Dans l'après-midi, les observateurs de l'ONU sont arrivés à Al-Koubeir. Ils « se sont d'abord rendus au village (voisin) de Maarzaf, où les victimes ont été enterrées, puis à Al-Koubeir pour inspecter les dégâts dus au bombardement de l'armée », a dit un militant à Hama, Abdel Karim al-Hamoui.

« Des soldats à un barrage à Maarzaf ont intimé l'ordre aux habitants de ne pas parler aux observateurs sous peine de représailles », a-t-il ajouté, après des témoignages fournis la veille sur la découverte macabre.

Ces observateurs, déployés en Syrie pour surveiller un cessez-le-feu préconisé par le plan de l'émissaire international Kofi Annan, mais violé quotidiennement, avaient été empêchés jeudi à deux reprises de se rendre à Al-Koubeir « par des barrages de l'armée » et par des « tirs à l'arme légère », selon l'ONU.

Devant le Conseil de sécurité, M. Ban a déploré que des armes lourdes, des balles perforantes et des drones aient été utilisés contre les observateurs depuis le début de leur mission à la mi-avril, selon des diplomates.

Le carnage d'Al-Koubeir est intervenu moins de deux semaines après celui de Houla, près de Homs (centre), où 108 personnes avaient été massacrées. Le régime avait aussi nié toute implication, mais un responsable de l'ONU avait dit que des soupçons pesaient sur les forces pro-régime.

L'opposition et l'OSDH ont accusé les « chabbihas », les milices pro-régime, d'être derrière les deux massacres.

Violences et manifestations

Malgré ces condamnations et les appels internationaux à cesser les hostilités, les opérations de répression et les combats entre soldats et rebelles ont encore fait 23 morts vendredi, selon l'OSDH.

De même, les troupes régulières ont ouvert le feu pour disperser les milliers de manifestants qui ont défilé à travers le pays, faisant plusieurs blessés, dans les provinces de Hama, Deir Ezzor et Bou-Kamal (est), a précisé l'ONG. Des protestations ont aussi eu lieu à Damas malgré des mesures de sécurité draconiennes, selon l'OSDH.

Pour ce vendredi, le slogan des militants anti-régime était « Révolutionnaires et commerçants, main dans la main jusqu'à la victoire », une apparente tentative de convaincre les hommes d'affaires et la bourgeoisie encore peu mobilisés à Damas et Alep (nord), de se joindre à la contestation.

À Kafar Zita, dans la province de Hama, les manifestants ont scandé : « Nous ne voulons plus de (révolte) pacifique! Nous avons des balles et des kalachnikovs! », tandis qu'une pancarte dénonçait : « Réunions, décisions, initiatives, et le peuple syrien est encore massacré ».

Plus de 13 400 personnes ont été tuées en près de 15 mois de révolte réprimée dans le sang, en grande majorité des civils tués par les forces régulières, selon l'OSDH.

Au début d'une rencontre avec la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton vendredi à Washington, M. Annan a dit qu'il évoquerait avec son interlocutrice la manière dont « nous pouvons accroître la pression sur le gouvernement et les parties pour que le plan de sortie de crise soit mis en oeuvre ».

À Moscou, le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Mikhaïl Bogdanov, a dit ignorer si M. Assad était prêt à quitter le pouvoir sous la pression de l'Occident, après une réunion avec une délégation américaine.

La mise en place d'un nouveau groupe de contact international sur la Syrie est en discussions et il devra inclure des pays qui ont une influence sur le régime et l'opposition.

La Chine et la Russie, alliées du régime syrien qui bloquent à l'ONU toute résolution le condamnant, se disent opposées à toute ingérence en Syrie.

Enfin, le Conseil national syrien doit se réunir samedi et dimanche en Turquie et se doter d'un nouveau président, vraisemblablement Abdel Basset Sayda, qui succèdera à Burhan Ghalioun avec pour mission d'unifier et de rendre plus efficace cette principale coalition de l'opposition.