Les affrontements meurtriers se sont étendus jeudi à Sanaa opposant unités militaires rivales de l'armée, mais aussi tribus fidèles et hostiles au président Ali Abdallah Saleh, le Yémen semblant sombrer dans la guerre civile.

Au moins 10 personnes ont péri jeudi, portant à 95 le nombre des morts depuis le regain des violences dimanche dans la capitale yéménite qui a fait voler en éclat un cessez-le-feu proclamé mardi et provoqué l'échec d'une médiation des monarchies voisines du Golfe.

Six personnes ont été tuées jeudi dans des accrochages qui ont opposé dans le quartier d'Al-Hasaba (nord de Sanaa) les hommes du puissant chef tribal Sadek al-Ahmar, rallié à la contestation, aux partisans d'un dignitaire tribal fidèle au président Saleh, Saghir ben Aziz, selon des sources officielles et tribales.

En outre, quatre autres personnes ont péri à Sanaa, selon des témoins et des sources médicales. Deux femmes ont été tuées par des tireurs embusqués sur les toits des immeubles qui ont visé la place du Changement où campent des manifestants anti-Saleh, et deux hommes sont morts dans un bombardement du secteur.

Les habitants de Sanaa avaient passé une quatrième nuit terrés dans leurs domiciles, apeurés par les déflagrations, et la circulation était paralysée dans la capitale où la plupart des magasins étaient fermés jeudi. Les routes menant à la capitale sont restées fermées pour le troisième jour consécutif.

«Je n'ai pas fermé l'oeil de la nuit. Les explosions étaient terrifiantes, surtout à l'aube», a déclaré à l'AFP Walid, propriétaire d'une épicerie.

Malgré les combats, les protestataires sont demeurés dans le camp de toile érigé sur la place du Changement, proche de l'Université de Sanaa, depuis février, selon un correspondant de l'AFP.

Un incendie s'est déclaré dans certaines tentes après la chute d'obus jeudi sur la place, selon des témoins.

Les nouvelles violences ont éclaté dimanche lorsque les forces fidèles au président Saleh ont ouvert le feu sur des manifestants qui avaient décidé de marcher de la place du Changement vers le centre de la capitale. Il y a eu 27 morts.

Des affrontements ont ensuite éclaté entre des unités fidèles au chef de l'État, dont la Garde républicaine commandée par son fils aîné Ahmed, et la première division blindée du général dissident Ali Mohsen al-Ahmar, rallié à la contestation en mars et dont les troupes protègent la place du Changement.

Les combats se sont étendus à plusieurs quartiers de Sanaa, dans une apparente tentative de la Garde républicaine d'encercler leurs adversaires.

Ainsi, des accrochages aux armes légères et moyennes ont opposé à Al-Hassaba les hommes de Sadek al-Ahmar et ceux de Saghir ben Aziz dont la résidence a été touchée par «13 obus», selon des sources tribales qui ont indiqué ignorer le sort de ce dignitaire de la tribu des Bakil.

La circulation était paralysée dans les secteurs des combats, notamment la rue Zoubeiri, nouvelle ligne de démarcation séparant désormais le nord de Sanaa tenu par le général Ahmar du sud de la capitale contrôlé par le camp loyaliste.

Un cessez-le-feu décrété par le vice-président Abd Rabbo Mansour Hadi s'est ainsi effondré, alors que le médiateur du Golfe Abdellatif Zayani a quitté Sanaa bredouille mercredi estimant que les conditions n'étaient pas réunies pour un règlement du conflit.

M. Hadi assure l'intérim en l'absence de M. Saleh qui se trouve en Arabie saoudite depuis plus de trois mois, après avoir été blessé le 3 juin dans une attaque contre son palais à Sanaa.

Au pouvoir depuis 1978, le président refuse de démissionner malgré la vague de contestation populaire qui secoue le pays depuis janvier.